
La nouvelle visite en France du président nigérian, Bola Tinubu, a été initiée début février, à peine trois mois après celle d’État. Les observateurs y perçoivent le symbole d’un possible repositionnement géopolitique entre Paris et les puissances anglophones africaines.
L’ultime visite intervient avant le sommet de l’Union africaine (UA) à Addis-Abeba en Ethiopie, du 12 au 16 février. Qualifiée de « visite privée », cette étape parisienne revêt néanmoins une empreinte diplomatique majeure, au moment où Paris tente de redéfinir son influence en se tournant vers les puissances anglophones du continent africain.
Dans un contexte national marqué par des défis économiques majeurs, une insécurité persistante due au terrorisme et une économie en recherche de diversification, Abuja cherche de nouveaux partenariats stratégiques.
De son côté, après avoir perdu du terrain dans ses anciens bastions d’Afrique francophone, notamment au Sahel où les coups d’État militaires ont accéléré le rejet de la présence française, Paris mise désormais sur des partenaires stratégiques comme le Nigeria, première économie et pays le plus peuplé du continent.
Le rapprochement entre Abuja et Paris dans la continuité de la visite d’État de Bola Tinubu en novembre est inédit. À Paris, le président nigérian doit rencontrer son homologue français Emmanuel Macron, confirmant ainsi la volonté des deux pays d’approfondir leur coopération dans divers domaines, notamment ceux relatifs à la transition énergétique, à la défense, à l’éducation et à l’innovation.
Compenser la perte d’influence au Sahel
Ce renforcement des liens intervient dans un contexte où la France cherche à compenser la perte de son influence au Sahel, en consolidant ses relations avec des puissances africaines anglophones à forte croissance économique et à poids politique déterminant sur la scène continentale.
Souvent perçu comme une puissance pivot de l’Afrique de l’Ouest, le Nigeria joue un rôle crucial dans la sécurité régionale et l’intégration économique, précisément via la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao).
Consciente de ce positionnement stratégique, Paris cherche ainsi à bâtir une relation plus pragmatique avec Abuja, en s’appuyant sur des intérêts communs en matière de lutte contre le terrorisme, de développement des infrastructures et d’échanges commerciaux.
Après Paris, Bola Tinubu devait poursuivre son périple en Éthiopie pour prendre part au sommet de l’Union africaine. Son détour par la France illustre une réalité géopolitique nouvelle pour Paris, en quête de nouveaux relais d’influence. Mais cette approche suffira-t-elle à enrayer le déclin de son ancrage en Afrique ? La question reste posée.