Les graves accusations de Corneille Nangaa, président de l’équipe sortante de la CENI, à l’encontre de Félix Tshisekedi sont au cœur des discussions depuis le samedi 23 septembre, alors que la question a depuis été vidée de sa substance par un arrêt de la Cour constitutionnelle en 2019.
En effet, en marge de sa participation à la 78ème Assemblée générale des Nations unies, le président congolais avait déclaré, en réponse à une question qu’il a bel et bien remporté la présidentielle de 2018 et qu’il n’y a jamais eu un quelconque compromis pour proclamer le vainqueur.
« Contrairement à ce que les autres ont pu croire, penser ou dire, il n’ya jamais eu d’arrangement entre mon prédécesseur et moi. Aucun arrangement frauduleux. J’ai gagné les élections de 2018 », a assuré Felix Tshisekedi devant un parterre de journalistes, le 19 septembre à New York.
Le président Tshisekedi reconnaît plutôt les contacts avec le directeur de cabinet de Joseph Kabila, à savoir Néhemie Mwilanya, et l’ancien ministre congolais des Affaires étrangères Raymond Tshibanda, en vue d’un « accord de gouvernance », matérialisé par la création de la coalition FCC-CACH.
« Et parce que j’aime parler avec les évidences, j’en veux pour preuve deux personnalités qui sont encore vivantes aujourd’hui, à savoir M. Raymond Tshibanda et Néhemie Mwilanya. Après les résultats des élections, Raymond Tshibanda m’avait contacté d’entrée de jeu. Lorsque nous nous sommes vus, je lui ai dit: « cher grand frère, si vous m’avez appelé ici pour trouver un arrangement afin que je devienne Premier ministre de votre candidat Emmanuel Shadary, c’est niet, parce que moi, j’ai gagné les élections. Je le sais, j’ai les résultats et je n’entrerai pas dans ce scénario » », a argué Felix Tshisekedi qui appelle plutôt « ceux qui parlent de fraude à fournir les preuves et dire qui est responsable de cette fraude ».
La realpolitik aurait conseillé de zapper et de s’en tenir à l’arrêt de la cour
Par contre, dans un communiqué, l’ancien président de la commission électorale au moment de la présidentielle de 2018, a accusé le chef de l’État de mentir, précisant qu’un accord politique avait bien été trouvé à l’époque avec Joseph Kabila pour permettre une transition pacifique à la tête du pays, avec l’accord de trois puissances africaines, sans autre précision.
Les faits querellés datent en effet de décembre 2018 et cinq années plus tard, en 2023, la realpolitik aurait voulu qu’aujourd’hui cette question devienne caduque, et donc sans objet.
Aussi, il convient de féliciter le président Tshisekedi d’avoir fait preuve de mansuétude, car il aurait pu zapper et conseiller de se référer à l’arrêt de la Cour constitutionnelle qui, depuis, a épuisé la problématique et clos le dossier.
Corneille Nangaa affirme être l’un des acteurs du « compromis ». Prince Epenge, un des porte-paroles de la coalition Lamuka, est clair à ce sujet. « C’est une affirmation suffisamment grave pour qu’elle donne lieu à l’ouverture d’une enquête par le procureur général de la République. On ne peut pas dépenser un milliard de dollars, déplacer plus de 50 millions d’électeurs et finir par un arrangement ».
Aveu d’avoir entravé la vérité et d’avoir commis un délit punissable

En d’autres mots, Corneille Nanga avoue être auteur ou co-auteur d’un faux et usage de faux, d’un délit visant à étouffer la vérité. Et il est le seul dans l’affaire, tous les autres acteurs qu’il cite ayant démenti leur participation au forfait.
En tout cas dans le camp de l’Union sacrée, la plateforme qui soutient le président Tshisekedi, « la thèse ne tient pas debout. Corneille Nangaa cherche à se faire de la publicité en s’attribuant des faitsgraves », estime Thierry Monsenepwo, membre du présidium de l’Union sacrée.
« D’abord, que monsieur Corneille Nangaa se place dans une posture où, pour qu’il existe, a besoin à chaque fois d’aller dans des contradictions et dans des mensonges. Le seul accord politique qui existe, c’est celui de gouvernance qui a été signé entre le Front commun pour le Congo (FCC), représenté par le professeur Néhémie Mwilanya et Jean-Marc Kabund pour le compte du Cach, qui a été rendu public le 6 mars 2019 et qui a donné suite à ce gouvernement de Sylvestre Ilunga Ilunkamba le 10 juillet 2019 », assure-t-il.
« Donc, il n’est pas question d’un autre accord. Cette sortie s’explique par deux éléments : premièrement, c’est que Corneille Nangaa applique aujourd’hui une posture qui consiste à dénigrer le gouvernement et à dénigrer l’État congolais pour qu’ensuite il puisse avoir les projecteurs braqués sur lui. Et deuxièmement, Nangaa est en train de jouer un rôle, celui de la personne qui est appelé à porter l’estocade à la démocratie pour discréditer les élections prochaines. Et cette posture, mmalheureusement, de Nangaa, va dans le sens d’énerver toute la population », explique Thierry Monsenepwo.
Pour rappel, Corneille Nangaa, en exil, est sous sanction des États-Unis pour « corruption et entrave au processus démocratique ». Il s’est déclaré candidat à la présidentielle de décembre 2023, sans toutefois déposer son dossier à la CENI.