C’est ce qu’on appelle une victoire écrasante. Pour son deuxième exercice à l’élection présidentielle après un premier succès dans la douleur en 2018. Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, revêtu pour la circonstance du dossard n° 20, a littéralement survolé ses 20 autres adversaires restés en lice, après le désistement de six d’entre eux en cours de route.

Au décompte final, le 31 décembre dernier, la Centrale électorale congolaise Ceni l’a crédité de 73,34% des électeurs ayant pris part au vote du 20 décembre 2023, soit un total de 13, 215.366 millions votes. Un score assommant, dans tous les sens du terme, n’ayant laissé que des miettes à tous ses autres concurrents, dont le plus significatif Moïse Katumbi Chapwe, relégué loin derrière avec ses presque ridicules 18,08%, soit 3,258.538 millions d’électeurs.
Pour un candidat encore Président en exercice, élu en 2018 avec moins de 50% des suffrages, c’est plus qu’un exploit, c’est un plébiscite, comme il ne s’est pas empêché de le dire lui-même après l’annonce de sa victoire, le dimanche 31 décembre, par le président de la Ceni Denis Kadima.
Cette victoire, mieux ce triomphe, Félix Tshisekedi Tshilombo l’avait pourtant bâti pierre après pierre depuis l’ouverture de la campagne électorale le dimanche 18 novembre dernier.
Une longue et laborieuse marche qui avait débuté le lundi 19 novembre dans la lointaine cité côtière de Muanda au Kongo central, et qui s’était terminée en apothéose le 18 décembre sur le terrain mythique de la Place Sainte-Thérèse de la commune de N’Djili à Kinshasa, en passant par l’ensemble des 26 provinces ainsi que des villes et cités de la vaste République démocratique du Congo.

Appel à préserver les acquis

Une campagne basée uniquement sur une exhortation à ses concitoyens à préserver les acquis des cinq ans passés, et à se prémunir contre «les candidats de l’étranger», allusion à certains de ses concurrents, soupçonnés de connivence avec les ennemis qui agressent le pays depuis des années.
Des thèmes attrayants qui n’ont pas manqué de faire mouche au sein d’un électorat congolais très remonté contre l’agression actuelle dans la partie est de la République, et qui a encore frais en mémoire les avancées sociales majeures, comme l’instauration de la gratuité de l’enseignement de base et de la maternité.
Un autre aspect, mais non moins important, qui a bâti le succès du candidat Félix Tshisekedi, c’est sans doute son caractère bonhomme, cette proximité avec les foules, sa facilité à dialoguer sans protocole avec les masses et à faire face à la contradiction avec un flegme consommé.
Cela s’était vérifié lors de la campagne en vue de ces élections, à l’occasion d’un meeting dans une localité de la province de la Mongala, lorsqu’un citoyen, particulièrement monté, lui reprochait de n’avoir pas construit même une toilette dans sa cité.
En guise de réponse, le candidat dira que les fonds destinés à certains projets sociaux de cette cité étaient déjà sortis des caisses du Trésor.
Aujourd’hui lauréat avec la mention distinction des présidentielles de 2023, Félix Tshisekedi, en attente de la confirmation de sa victoire par la Cour constitutionnelle le 10 janvier prochain, a désormais les mains libres pour conduire sa politique sur un nouveau bail de cinq ans, sans entraves ou presque, ayant gagné sa victoire à la seule sueur de son front.

Félix Tshisekedi prête serment le 20 janvier 2024 pour son 2ème mandat

Le président élu Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, qui s’était présenté comme candidat N°20 en vue de sa propre succession et qui a remporté le scrutin du 20 décembre, prête serment le 20 janvier en tant que président de la République démocratique du Congo. Autant de fois le 20, une prédestination ?

Le serment, comme à l’accoutumée, devrait être acté sur un exemplaire de la Constitution du pays par le président de la Cour suprême de Justice, à l’esplanade du Palais du peuple, siège du parlement.
Dans le décor : les membres de tous les Corps constitués, les représentants des églises ainsi que les diplomates accrédités à Kinshasa, notamment, sans compter la grande foule des partisans des centaines de partis membres de l’Union sacrée de la Nation, qui a porté la candidature du champion.
Felix Tshisekedi rempile ainsi pour cinq nouvelles années dans ce qui est son 2ème mandat à la tête de la RDC, dans l’objectif, il l’a dit, de poursuivre l’immense travail de reconstruction et de modernisation de la RDC initié depuis 2019, année où il prend les rênes du pays.

Des tendances qui ont assommé la concurrence

Les premières tendances ne laissaient planer aucun doute quant au nom du vainqueur du scrutin du 20 décembre, en aucun moment de la publication progressive des résultats du vote, le président sortant n’ayant été inquiété ni surtout devancé par son poursuivant direct, tellement l’écart était énorme.
Le président candidat à sa propre succession arrivait déjà en tête du scrutin, et largement, aux termes des premières tendances de résultats publiées le vendredi soir 22 décembre par la Commission électorale nationale indépendante qui – une première – avait aménagé un espace des opérations et des résultats dénommé « Centre Bosolo », où elle a installé un centre de compilation « afin de permettre à un plus grand nombre des Congolais de suivre de près la publication des résultats centre par centre et bureau de vote par bureau de vote ».
Il s’agissait pour la Ceni de la volonté de respecter le standard international en matière électorale. Plus de 500 personnes pouvaient ainsi accéder au centre « Bosolo », en privilégiant les journalistes, les observateurs électoraux, les membres de partis et les candidats présidents ainsi que les observateurs internationaux qui ont participé à ces élections.

Un exploit

Une délégation de la SADC reçue en audience par le président de la CENI Denis Kadima ( troisième personne de gauche vers la droite en veste) Image source : opinion-info.cd

Malgré le rapport des observateurs signalant certaines irrégularités, il faut reconnaître qu’il s’agit là d’un exploit que celui que vient de réaliser la Commission électorale congolaise. Alors qu’ils étaient nombreux à n’accorder aucun crédit au processus à la vue de plusieurs ratés.
Il y a d’abord eu cette histoire de cartes d’électeur qui ne conservaient aucun écrit et dont les photos s’efforçaient totalement.
Ensuite le grand couac du premier jour du scrutin, où des bureaux n’avaient pas reçu des machines à voter, et d’autres seulement tard le soir, dans des endroits parfois à peine éclairés. Ce qui a poussé la Ceni à prolonger le vote d’un jour, ou de deux à certains autres endroits, en violation même de la loi électorale, qui avait d’ailleurs été déjà sabordée avec la réouverture des bureaux d’enrôlement pour corriger la bourde des cartes illisibles.
Mais cela n’enlève en rien au mérite. Pour avoir réussi à organiser son scrutin dans les délais, dans un pays immense, soit 80 fois la Belgique ou encore 4 fois la France, en déployant le kit électoral jusqu’au fin fond de ce pays continent, souvent sur des infrastructures routières d’un autre siècle, il convient de reconnaître que la CENI a abattu un travail de Titan pour réussir son pari. Il fallait le souligner.

Les résultats de la diaspora

Le ton avait été donné avec les premiers résultats partiels de l’élection présidentielle en RDC pour la diaspora, réputée grincheuse, et qui votait pour la première fois dans l’histoire de la RDC, dans cinq pays tests, à savoir l’Afrique du Sud, la Belgique, le Canada, les États-Unis et la France.
Déjà là, après compilation couplée à 22 circonscriptions de l’intérieur du pays, le président sortant Félix Tshisekedi (Union sacrée) était pointé largement en tête avec 82,6% des voix, son poursuivant direct Moise Katumbi (Ensemble pour le changement) deuxième avec 14,3% des suffrages, et – surprise – en 3ème position, avec seulement 0,9% des votes, Radjabo Tebabho Sorobabho, un parfait inconnu qui devançait Martin Fayulu (0,8%). Cette position d’un candidat sorti de nulle part avait jeté le doute sur la crédibilité du scrutin.
L’explication est venue des électeurs musulmans, qui ont déclaré : « Radjabo est notre frère musulman et partout à travers le pays où se trouve les musulmans, nous sommes appelés à lui donner nos voix ».

Le satisfecit de la Mission de la CEEAC

En tout cas, aux termes d’une déclaration préliminaire lue le vendredi 22 décembre, à la clôture du scrutin, par Philémon Yang, ancien Premier ministre du Cameroun, la mission d’observation de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) a tenu à exprimer sa satisfaction sur le déroulement du processus ainsi que sur la maturité de la population congolaise.
Comme le mentionne le chef de cette mission, hormis des défis liés notamment à la logistique, lesquels ont causé le retard dans l’ouverture des bureaux de vote dans plusieurs coins du pays, les opérations se sont bien déroulées.
« En dépit de retard, l’ouverture de bureaux de vote a été faite dans le calme. Les présidents de bureaux se sont assurés que les urnes étaient vides avant le début des opérations électorales conformément à l’article 56 de la loi électorale », a-t-il reconnu.
La MOE CEEAC souligne que les différents sites de vote ont été installés dans des endroits accessibles pour toute personne, y compris les PVH.

Appel à respecter le verdict des urnes

Notant les difficultés d’alimentation mais aussi des dysfonctionnements du DEV constatés dans certains bureaux de vote, la MOE CEEAC souligne que « les élections générales du 20 décembre 2023 en RDC se sont déroulées de façon générale dans le calme. En dépit des défis logistiques, les électrices et les électeurs congolais ont fait preuve de maturité et de leur attachement aux valeurs démocratiques », a dit le chef de la MOE CEEAC.
Il a également salué la décision d’autoriser la poursuite du vote le 21 décembre au sein de bureaux qui n’ont pas ouvert le 20 décembre, estimant que celle-ci a permis aux électeurs d’exercer leur droit civique, dans le respect de l’équité et de l’égalité des citoyens congolais.
Philémon Yang a enfin appelé tous les Congolais à respecter le verdict des urnes, les candidats et partis politiques à privilégier les voies légales en cas de contestation des élections ou des résultats, et la société civile congolaise à s’abstenir de se prononcer sur les résultats en dehors du cadre fixé par la loi.
44 millions de Congolais inscrits étaient appelés aux urnes le 20 décembre pour des élections présidentielle, législatives et locales.

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