Louis Armstrong
Le 4 juillet 1990 naît aux Etats-Unis d’Amérique, un enfant qui sera le génie musical du siècle.
Il s’appelle Louis Armstrong.
Il jouait de la trompette comme on n’en a jamais joué, et comme peut-être on n’en jouera plus jamais. Avec une puissance et un swing impossible à égaler, encore moins à dépasser.
Une trompette dans ses mains et le monde n’existait plus.
Il aimait les notes, c’est la raison pour laquelle il jouait si bien. Il aimait les notes, c’est la raison pour laquelle il s’est marié quatre fois: « Mes femmes ne supportaient pas la trompette… Si j’ai une discussion avec ma femme, ça ne m’empêche pas de tirer plaisir de mon jeu, je sais que je peux toujours tirer plaisir de mon jeu, je sais que je peux toujours souffler dans ma trompette, et elle est tombée amoureuse de moi. »
Il y’a Louis et les autres. Il n’est pas un musicien de jazz, quelque soit son style, qui puisse jouer pendant 32 mesures sans payer son tribut musical à Louis.
C’est Louis Armstrong qui a tout fait et tout fait le premier. Il a fait prendre le jazz, comme on fait prendre un feu timide. Il y’a Louis et puis les autres.
MAKOSA : juillet 1990
En juillet 1990, le Cameroun sort la tête haute du Mondial italien. Arrivés en curiosité exotique, les Camerounais repartent en héros. L’artisan de cette grande épopée du football africain: ROGER MILA.
Il est arrivé en Italie avec un sourire de vacancier. Roger n’y peut rien: il a une dégaine de touriste. C’est sa force. Sur un terrain, on a parfois presque envie de lui prêter un chapeau de paille, de lui refiler une limonade et un transat. Roger est cool! Il attend la bonne occase. Roger n’est pas pressé. Il sait qu’à un moment donné, ne fût-ce que durant une poignée de secondes, le sort va lui sourire. Forcément. Un rebond capricieux, une étourderie, une passe hasardeuse, une grosse bévue. Ensuite, c’est à lui de jouer. Il met en mouvement ses longues jambes élastiques, marque et file vers le poteau de corner. Là, devant un totem imaginaire il danse le makossa, une lambada camerounaise sportive. Un coup de hanche à gauche, un coup de hanche à droite, la main sur le ventre, le sourire aux lèvres, Roger remercie le sort. Puis il retourne se placer dans sa position de guetteur silencieux, les bras ballants et l’œil malicieux. Roger est génial. C’est un pied-de-nez fantastique à tous ceux qui confondent football et informatique.
MARCUS GARVEY : Création de l’UNIA
Le 31 juillet 1914, Marcus Garvey crée l’Unia. Elle sera la plus grande organisation nègre de tous le temps en terme de mobilisation populaire. Ses publications étaient lues jusque dans les villages reculés d’Afrique, où elles étaient d’ailleurs interdites. Le 1er août 1920, l’Unia tient son premier congrès à New York.
Les rues de Harlem roulent au son de marches entraînantes. Des troupes en uniformes élégants défilent au pas cadencé vers le Madison Square Garden. Mister Garvey est là. Pour répandre le message: « Nous sommes les descendants d’un peuple qui a trop souffert; nous sommes les descendants d’un peuple résolu à ne plus souffrir. Nous allons mobiliser les 400 millions des Noirs de la planète et planter sur le sol d’Afrique la bannière de la liberté. »
Les rues de Harlem roulent sur le son de marches entraînantes, entraînantes vers la liberté.
LE MARATHON DU NEGUS
Rome, Jeux Olympiques 1960: Abebe Bikila remporte le marathon. Il sera le seul athlète de l’histoire des Jeux Olympiques à avoir remporté deux fois cette épreuve. Lorsqu’il y’a quelques heures le marquis Dexter a donné le dépert du marathon, personne n’aurait parié la moindre lire sur le dossard numéro 11. Un illustre inconnu courant pieds nus. Tous les regards étaient fixés sur le Marocain Rhadi, le Fraçais Alain Mimoun, le Britannique Kelly et le Belge Van Der Drerseche. Dès les premiers kilomètres, deux hommes se sont détachés du peloton de tête: le Marocain Rhadi et le dossard numéro 11. Il ne va pas tenir longtemps à l’allure de Rhadi, se disait-on. Mais vers le 41e kilomètre, le dossard numéro 11 étaient toujours là. Et puis d’allonger la foulée. Et de prendre une dizaine et puis une centaine de mètres d’avance sur Rhadi. Et de marteler fièrement pieds nus les pavés de Rome, cette ville d’où partirent ceux qui voulaient réduire son pays en esclavage. Et de franchir le premier la ligne d’arrivée. L’illustre inconnu a 27 ans. Il est caporal de la Garde impériale du Négus. Tout le monde est surpris par sa victoire, sauf lui: « Je n’étais pas le seul de la Garde à pouvoir gagner. » Pourquoi a-t-il couru pieds nus? : « J’ai toujours couru comme cela dans la brousse. Et d’ailleurs on ne porte pas de chaussures à la Garde », répond-il. Svelte, visage étroit et fier souligné par un nez saillant et une fine moustache le dossard numéro 11 s’appelle Abebe Bikila.
L’HOMME C’EST AUSSI LA FRATERNITÉ
Né en 1750 et mort en 1831, l’abbé Grégoire fut un grand défenseur de la cause des opprimés en général et des Noirs en particulier. En 1789, il monte au créneau à l’Assemblée pour le respect des droits des mulâtres libres de Saint-Domingue. Plus tard, il jouera un grand rôle dans la « Société des amis des Noirs » qui réclamait l’abolition de l’esclavage.
Il est des noms qui sont des symboles: au temps, aux modes, à la mort ils survivent. Il est des noms qui comme celui de l’abbé Grégoire, rappellent que l’homme c’est aussi la fraternité.
Longtemps, bien longtemps avant que les voix ne s’élèvent contre l’abaissement d’une partie de l’humanité à l’esclavage, l’ecclésiastique lorrain rappela que « la liberté des hommes est un droit comme un besoin dans tous les climats ».
A Hume qui ne cessait de clamer que « jamais on ne vit de Noir distingué » l’abbé apprit que « pour les anciens Grecs l’identité noire des Egyptiens était une évidence ». Ensuite il adresse une interrogation: « Reconnait-on dans la peinture que César fait des Gaulois les habitants de la France? ». Aux souteneurs du négoce de la chair humaine qui répétaient inlassablement que si, que « s’il cesse la France fera banqueroute », l’abbé Grégoire avoua « ne jamais avoir pu saisir la connexité de ces idées ».
La fraternité fut un mot, l’abbé Grégoire en fit un os de plus à joindre à son squelette.