Le regard du monde reste rivé sur les différentes péripéties de la campagne électorale américaine, où aucun jour ne passe sans un nouveau rebondissement. Le dernier : la sénilité dérangeante de Joe Biden. Faut-il remplacer celui-ci par Kamala Harris ?
Le président Joe Biden subit de plus en plus de critiques sur sa capacité de diriger, compte tenu de son âge. Alors qu’il voulait en apporter la preuve contraire, il a confondu le président de l’Égypte et celui du Mexique, mais aussi Emmanuel Macron et François Mitterrand en poste à Paris. Alors que ce dernier est décédé depuis bien longtemps, le 8 janvier 1996.
À 81 ans, Joe Biden a multiplié en peu de temps les erreurs, dans le droit fil d’un mandat émaillé de diverses chutes, mouvements étranges ou confusions de discours. Tant d’occasions pour l’opposition et le camp Trump de pointer l’âge du président américain et de marteler sur les réseaux sociaux et les chaînes de télévision que Joe Biden est âgé et sénile. Et cela paye. Un sondage de NBC News du 6 février se révèle ainsi dramatique pour le camp démocrate, à quelques mois des élections américaines : il montre que 76 % des électeurs sont préoccupés par l’âge de Biden. Au point que le parti songe à débrancher le président sortant ?
Kamala Harris se dit prête à prêter main forte
Le lundi 12 février, la vice-présidente américaine Kamala Harris a, en tout cas, déclaré dans une interview au Wall Street Journal se sentir « prête à servir mon pays. Il n’y a aucun doute là-dessus ». Affirmant que tous ceux qui l’ont vue à l’œuvre « en tirent la conclusion » sur sa capacité de diriger.
L’entretien qui sonne comme une proposition d’alternative à la candidature de Joe Biden n’en est pas une d’après le WSJ qui assure qu’il avait été réalisé avant une déclaration de Robert Hur, procureur spécial, à l’effet dévastateur dans l’opinion publique. Ce dernier, chargé d’une enquête sur des documents classifiés en possession de l’actuel président, assurait jeudi qu’un jury aurait du mal à condamner un « homme âgé à la mauvaise mémoire ».
Une arme pour Trump
Jean-Eric Branaa, maître de conférences à l’université d’Assas, chercheur au centre de relations internationales Thucydide et auteur de nombreux livres sur la politique américaine, l’assure : « Ces confusions font parties de Joe Biden et ont toujours amusé les journalistes ».
D’après l’auteur de Joe Biden : Biographie (Nouveau Monde Éditions), ces erreurs de formules proviennent de son enfance, alors que le président américain souffrait d’un « bégaiement chronique ». Depuis, il se concentre alors plus sur « la musique des mots que sur les mots eux-mêmes ». Ces problèmes dès son plus jeune âge l’ont amené à apprendre régulièrement des phrases par cœur.
Problème : « Il en a gardé des séquelles assez importantes qui sont évidemment accentuées avec la vieillesse », constate Jean-Eric Branaa.
Ces approximations, qui amusaient la presse lorsqu’il n’était pas président, ont pris une nouvelle tournure depuis qu’il est entré à la Maison-Blanche et sont une arme redoutable pour le camp Trump.
Joe Biden
« Je n’ai pas des problèmes de mémoire »
Donald Trump, le « jeune » de l’élection, aura 78 ans au moment de l’élection et Joe Biden 82. « La mortalité aux États-Unis est de 75 ans pour un homme blanc », rappelle le maître de conférences. L’un et l’autre sont en quelque sorte des présidents en sursis. Si du côté républicains les candidats ne manquent pas pour remplacer Trump le cas échéant, du côté des démocrates, la situation est toute autre. Le parti ne possède pas, dans son fonctionnement, un cas de figure pour forcer un candidat à abandonner. D’autant que l’année étant déjà bien écoulée, une primaire serait complexe à organiser. Les « super délégués » du Parti démocrate pèseraient de tout leur poids. Or « ces notables locaux sont pro-Biden et seraient alors pro-Kamala Harris ». Elle serait certaine d’avoir la majorité à la convention si jamais elle y allait : personne ne se présenterait contre elle.
Kamala Harris, la possible alternative
Si Joe Biden venait à se retirer de la présidentielle de lui-même, il n’y aurait pas d’autres alternatives à une candidature de Kamala Harris, décrite en Occident comme très à gauche et peu populaire dans l’électorat américain.
Bien que plus progressiste que Joe Biden, « cela ferait justement d’elle une très bonne candidate aujourd’hui », assure le chercheur Jean-Eric Branaa. Elle aurait une plus grande capacité à parler aux minorités.
Or, dans cette élection qui promet d’être serrée, la différence se fera dans des États clés, l’Arizona ou la Géorgie en particulier. « Elle redonnerait une place aux minorités qui, depuis Barack Obama, attendent à nouveau de pouvoir être représentées plus fortement », assure Jean-Eric Branaa.
Autre force pour Kamala Harris : être une femme. Vice-présidente depuis 3 ans, elle a fait entrer dans l’esprit de toutes les Américaines que c’était possible.
Lors de la Conférence internationale à Munich sur la sécurité, fin février, c’est Kamala Harris qui a présidé la délégation américaine à la place de Joe Biden pour la deuxième année consécutive. C’est elle aussi qui a mené les négociations américaines avec la zone Indopacifique, les pays africains et sud-américains.