Le général Évariste Ndayishimiye a destitué, mi-septembre, son Premier ministre, le général Alain-Guillaume Bunyoni, l’un des hommes les plus puissants du pays, qu’il a remplacé par celui qui était à la tête d’un super ministère regroupant l’Intérieur, la Sécurité publique ainsi que le Développement communautaire.
Le président Évariste Ndayishimiye ne cessait de se plaindre d’avoir les mains liées depuis son accession au pouvoir il y a deux ans. Il avait dénoncé publiquement, quelques jours auparavant, certains hauts responsables qui se croiraient « tout-puissants », qui saboteraient son action et qui auraient des velléités de coup d’État.
L’allusion visait clairement son Premier ministre et ancien compagnon de maquis, le général Alain-Guillaume Bunyoni, et tout le monde attendait depuis le tour qu’allait prendre ce bras-de-fer.
On a ainsi appris que l’Assemblée nationale avait approuvé la nomination d’un nouveau Premier ministre. L’opération a été menée dans le plus grand secret. Les parlementaires burundais ont reçu chacun, tard dans la nuit, un message WhatsApp qui leur demandait de se présenter au palais de Kigobe à 8h30 « pour un travail important », sans plus de précision.
Les spéculations sont alors allées bon train, jusqu’à l’ouverture de la séance. Le président de l’Assemblée nationale, Gélase-Daniel Ndabirabe, a alors lu devant la plénière un message du chef de l’État qui demandait aux députés d’approuver son candidat au poste de Premier ministre, le lieutenant-général Gervais Ndirakobuca, jusqu’ici ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique.
Les choses sont alors allées très vite. À un député qui demandait un vote à bulletin secret, le président de l’Assemblée a demandé s’il avait « des choses à cacher », avant d’ordonner un vote à main levée. Tout le monde s’est empressé de lever bien haut la main.
D’autres têtes sont tombées
Le Premier ministre n’est pas le seul haut responsable burundais à être tombé. Est-ce la volonté d’administrer un électrochoc à ses collaborateurs, qu’il accuse souvent d’être « des fainéants » ? En tout cas, le président a remplacé un peu plus tôt dans la matinée son chef de cabinet civil, l’inamovible général Gabriel Nizigama, par un jeune colonel issu du service des renseignements.
C’est un poste clé dans l’administration du Burundi, car le chef de cabinet civil est considéré comme un super-Premier ministre.
Le nouveau chef du gouvernement est, lui aussi, un homme du sérail. Le général Gervais Ndirakobuca, alias Ndakugarika, « Je vais t’étendre raide mort » en français, était jusqu’ici à la tête d’un superministère et n°2 du gouvernement.
Lui aussi compagnon de maquis de tout ce beau monde, il est au cœur du pouvoir de l’ex-rébellion du CNDD-FDD depuis 2005. Et contrairement au sortant décrit comme froid et calculateur, le nouveau Premier ministre burundais est un homme qui n’hésite pas à trancher, quitte à prendre des décisions impopulaires.
Reste maintenant à savoir si c’est un simple jeu de chaises musicales, comme d’habitude à Bujumbura, ou la victoire d’une faction sur une autre. Personne ne peut le dire pour le moment, mais le nouveau gouvernement attendu pourra donner une première indication.