La plus grande richesse de la République démocratique du Congo demeure sans conteste son industrie minière, qui constitue 98% de ses exportations, alors qu’elle ne contribue à peine qu’à 18% au PIB national et à 11% en termes de création d’emplois. Il existe donc un gap qu’il s’agissait de corriger. C’est dans cette optique qu’il faut aligner les différentes réalisations observées dans divers secteurs.
La République démocratique du Congo détient tous les atouts pour sa grandeur. On dit généralement que le développement de l’Afrique passe par celui de la RDC. Mais il a fallu une volonté politique affirmée pour tenter de réaliser ce destin.
Aujourd’hui, on peut légitimement affirmer que ce pays se trouve sur la voie de son développement. Un peu comme l’Arabie saoudite qui a bâti sa splendeur autour de son pétrole, la RDC réalisera son envol à partir de la fabuleuse richesse de son sous-sol, dont d’ailleurs 30% seulement de sa géologie est connue jusqu’à aujourd’hui, à en croire les spécialistes.
Ainsi, des initiatives sont prises, d’une part pour diversifier l’économie de ce pays, totalement dépendant de l’importation pour assouvir ses besoins et, de l’autre, transformer les matières premières localement en vue d’une valeur ajoutée et créer des emplois. Dans cette optique, la relance de la Sidérurgie de Maluku constitue un pilier important.
Mais, un des principaux supports concerne les infrastructures routières. Avec le programme des 145 territoires (PDL-145T), dont la tutelle a justement été assurée par la Première ministre Judith Suminwa Tuluka, alors ministre du Plan, la RDC devrait, à terme, réaliser une véritable « révolution » : des infrastructures de base modernes dans tous les recoins du pays, comprenant notamment 38 000 km de routes de desserte agricole devant interconnecter les 26 provinces, sans oublier 1 198 écoles, 788 centres de santé et des micro-centrales photovoltaïques.
Félix Tshisekedi : «Faire des infrastructures un levier majeur de la transformation économique »
C’est aussi dans ce cadre que le Président Félix Tshisekedi, s’exprimant à l’ouverture de l’Expo Béton, a rappelé son engagement à faire notamment du secteur des infrastructures un levier majeur de la transformation économique en RDC.
« Je suis résolument engagé à mettre en œuvre des solutions concrètes et durables pour intégrer pleinement nos territoires enclavés à l’économie nationale et internationale. Cela passe par l’amélioration de nos infrastructures de transport, de communication et d’énergie. Mon engagement sur cette question est sans équivoque, faire du secteur de la construction, des infrastructures et de l’habitat, un levier majeur de notre économie », a-t-il assuré le mardi 10 septembre à la 8ème édition du Salon du développement des villes « Expo Béton ».
« Lors de mon investiture le 21 janvier 2024, j’ai pris six engagements devant le peuple congolais, qui constituent le socle de mon programme de gouvernance. En plus de ces engagements, j’ai placé le désenclavement de nos territoires parmi les trois initiatives présidentielles prioritaires de mon mandat », a rappelé le chef d’État congolais.
L’accès équitable aux services de base, une condition pour la cohésion
Pour lui, la question du désenclavement des territoires constitue une priorité absolue, car elle touche directement à l’égalité des chances pour tous les concitoyens, quels que soient leurs lieux de résidence.
« Les infrastructures du pays doivent garantir à chaque congolais, qu’il vive en ville ou dans les zones rurales les plus reculées, un accès équitable aux services de base, aux opportunités économiques et au moyen de se développer », a-t-il dit, soulignant qu’elles constituent également une condition indispensable pour assurer la cohésion nationale, réduire les inégalités et favoriser un développement harmonieux et inclusif de la RDC.
Le Président Tshisekedi a émis le vœu de voir cette exposition, qui se déroule autour du thème « Révolution urbaine : des solutions durables du Corridor Ouest pour Kinshasa et le Kongo central », jeter les bases d’une révolution urbaine qui transformera durablement la capitale de la RDC ainsi que la province du Kongo central au sud-ouest du pays.
La 7ème édition du salon pour le développement des villes, Expo Béton 2023 organisée sous le thème « Kolwezi-Lualaba, Eldorado du Corridor Sud », s’était tenue du 30 septembre au 4 octobre 2023 à Kolwezi, dans la province du Lualaba, une province dont on connaît aujourd’hui la modernisation.
Le Corridor de Lobito
En dehors de l’interconnexion intérieure, un autre pilier de taille qui facilitera l’évacuation de l’excédent de la production locale, mais aussi les contacts avec les pays voisins partageant les mêmes objectifs, est le Corridor de Lobito. Sensé déboucher sur l’Océan, il revêt une importance de premier ordre.
Le corridor de Lobito relie les régions du sud de la République démocratique du Congo et du nord-ouest de la Zambie aux marchés commerciaux régionaux et mondiaux via le port de Lobito en Angola. Il est le premier corridor économique stratégique lancé dans le cadre du partenariat phare du G7 pour les infrastructures et les investissements mondiaux (PGII), en mai 2023.
En marge du sommet du G20 à New Delhi en septembre 2023, l’UE et les États-Unis ont publié une déclaration commune, s’associant pour soutenir le développement du corridor.
Cette infrastructure permettra de libérer l’énorme potentiel de la région, améliorera les possibilités d’exportation pour l’Angola, la RDC et la Zambie et créera de la valeur ajoutée et des emplois grâce à des investissements et des mesures non contraignantes.
L’UE et les États-Unis codirigent le soutien au développement du corridor, y compris les investissements dans les infrastructures, les mesures non contraignantes pour la facilitation du commerce et du transit, les investissements dans les secteurs connexes pour favoriser une croissance durable et inclusive et les investissements en capital (chaînes de valeur agricoles, énergie, transport/logistique, enseignement et formation techniques et professionnels) le long du corridor en Angola, en RDC et en Zambie.
Définition des rôles et objectifs du corridor
Lors du forum « Global Gateway » qui s’est tenu en octobre 2023, l’UE et les États-Unis ont signé – avec l’Angola, la RDC, la Zambie, la Banque africaine de développement (BAD) et l’Africa Finance Corporation (AFC) – un protocole d’accord pour définir les rôles et les objectifs de l’expansion du corridor.
En janvier 2023, les ministres responsables des transports et du développement du corridor en Angola, en RDC et en Zambie, avec le soutien et la coordination du Secrétariat de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), ont paraphé l’accord de l’Agence de facilitation du transport en transit du corridor de Lobito (LCTTFA). L’accord vise à fournir une route efficace et efficiente qui facilite le transport de marchandises à l’intérieur des territoires entre les trois États membres du corridor. Ceci sera rendu possible à travers l’harmonisation des politiques, des lois et des réglementations ; des stratégies et activités conjointes ; les coordonnées de développement des infrastructures du corridor ; la diffusion de données sur le trafic et d’informations commerciales ; et la mise en œuvre d’instruments pour la facilitation des échanges.
L’objectif est de soutenir une plus grande participation des PME dans les chaînes de valeur des entreprises, principalement dans l’agriculture et l’exploitation minière, en vue d’accroître le commerce et la croissance économique le long du corridor de Lobito et dans toute la région de la SADC.
La Batterie électrique
Le monde de demain impose aux industries de développer des stratégies pour une transition vers les énergies propres et renouvelables. Et la RDC se retrouve au cœur de la transition énergétique, avec la plus importante réserve au monde en ressources naturelles stratégiques nécessaires à la fabrication des batteries et des véhicules électriques, des panneaux solaires et des éoliennes ainsi que des appareils électroniques.
Ainsi, le sous-sol congolais, un réel « scandale géologique » par la diversité des minerais qu’il regorge et ses 3,5 millions de tonnes métriques de réserves de cobalt générant 70% de la production mondiale de ce minerai dans le monde, constitue un autre pilier pour le décollage économique de la RDC.
Conjugué à ses 3T – Tin (étain), Tantale (coltan) et Tungstène – ainsi qu’à l’or, la RDC est au centre de tous les enjeux.
D’où la préoccupation exprimée par Kinshasa pour la certification des minerais à partir des lieux d’extraction et non plus de négoce pour l’accès de ces minerais au marché international.
La présence de ces minerais stratégiques est une aubaine et, surtout, un tournant décisif pour le peuple congolais, qui se positionne en acteur mondial dans la transition énergétique et qui devra tirer avantage du volume exponentiel en investissements étrangers, des revenus accrus pour le Trésor, de l’accroissement de la prospérité et de la création des emplois.
Consciente de cet enjeu extrême, la RDC s’est dotée d’un « Conseil congolais de la Batterie », censé mettre en place, promouvoir et gérer toute la chaîne de valeur des minerais qui interviennent dans cette industrie.
Tous ces efforts ne pourront atteindre leur but sans un réseau de production et de distribution d’eau et d’électricité aux standards reconnus. La modernisation du barrage d’Inga ainsi que la construction des centrales et minicentrales à travers la RDC procèdent de ce souci. Car, dit-on, « il n’y a aucun développement sans électricité ».
Relier l’exploitation minière aux autres secteurs de l’économie
La 3ème édition de la table ronde diplomatique, organisée par le groupe consultatif Brussels Africa Hub, s’est tenue le 6 décembre à la Maison de la poste à Bruxelles autour du « Type de collaboration entre l’Europe et l’Afrique sur la localisation de la chaîne de valeur des minéraux stratégiques et critiques en Afrique ».
Pour le Prof Christian Ndongala Nkuku, ambassadeur de la RDC au Benelux et auprès de l’Union européenne, le premier à intervenir, l’industrialisation de la RDC sonnera comme le moteur de croissance pour l’Afrique, un pays qui regorge une cinquantaine de minéraux dont seule une dizaine sont exploités.
Il a expliqué que « le gouvernement et les acteurs privés de la RDC mettent tout en œuvre pour s’approprier pleinement la Vision minière africaine afin d’exploiter et valoriser durablement les gisements des minerais stratégiques du pays, relier l’exploitation minière aux autres secteurs de l’économie et créer des emplois ainsi que des richesses durables pour les Congolais mais également pour les autres Africains ».
La « Vision minière africaine » adoptée par les chefs d’État du continent lors du sommet de l’Union africaine en 2009 est considérée comme un point de départ important pour la position et le rôle de l’activité minière dans la transformation structurelle du développement de l’Afrique, a précisé le diplomate congolais.
Le Prof Christian Ndongala a également rappelé que l’accord entre l’UE et la RDC d’octobre 2023 sur les minerais stratégiques et critiques attire « l’attention des partenaires européens et d’autres qui souhaiteraient accéder à des stocks miniers à travers la planète d’en valider la traçabilité avant acquisition ; traçabilité non pas à partir des entrepôts mais à la source, à savoir à partir des mines d’origine ».
Selon l’ambassadeur congolais, le secteur minier représente plus de 90% des exportations. Il contribue à hauteur de 18% au PIB et à 11% dans la création d’emplois en RDC. Dans ce secteur, on retrouve notamment des entreprises chinoises, indiennes, kazakh et australiennes.
La production des batteries électriques, un secteur qui va booster la croissance en Afrique
Il a aussi rappelé l’accord de partenariat entre la RDC et la Zambie portant sur la production des batteries des véhicules électriques et les énergies renouvelables, un secteur qui contribuera grandement à la création de milliers d’emplois ainsi qu’à l’industrialisation de la RDC et ainsi booster la croissance en Afrique.
La 3ème édition de la table ronde diplomatique avait pour objectif de construire des passerelles entre les diplomates africains, les institutions de l’Union européenne et les entités du secteur privé sur la mise en œuvre du Global Gateway Africa Europa Investment Package qui vise à investir environ 150 milliards d’euros dans les infrastructures en Afrique à l’horizon 2027.
Elle visait également à mettre en lumière les enjeux, les opportunités et les défis liés à l’investissement dans la chaîne de valeur des minéraux stratégiques et critiques avec un focus sur la République démocratique du Congo.
Les participants à la table ronde, venus notamment de la RDC, de l’Afrique du Sud, de l’Égypte, de la Guinée, du Kenya, du Rwanda et du Tchad, se sont donné rendez-vous à Kinshasa du 13 au 14 novembre prochain pour le Forum Makutano, qui traitera des mines, des finances et de l’agro-industrie.