En France, le passage du texte de loi sur l’immigration devant une commission mixte paritaire le lundi 18 décembre laissait entrevoir plusieurs scénarios possibles, et le risque pour la majorité de voir son projet de loi échouer.

Dans une dernière tentative de sauver la loi Immigration préparée par le gouvernement, après la motion de rejet adoptée lundi 11 décembre, une commission mixte paritaire (CMP) devait se réunir à l’Assemblée nationale. Sa mission : trouver un texte de compromis qui puisse satisfaire les quatorze parlementaires qui la composent, dont une moitié de députés et l’autre de sénateurs, représentatifs des équilibres politiques des deux chambres.
Si les débats de la CMP sont à huis clos, les différents camps politiques avaient déjà fait connaître leur ligne et leurs exigences au regard de ce texte, laissant entrevoir plusieurs scénarios possibles.
Pour les députés Renaissance, c’est le fruit d’un travail de plusieurs mois qui devait se jouer. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a fait de cette loi Immigration son cheval de bataille, et tenté de trouver une position d’équilibre qu’il pensait en mesure de satisfaire les élus de droite et de gauche.
« On est méchant avec les délinquants, mais gentil avec les gentils », avait-il résumé en novembre 2022 dans une formule devenue emblématique de ce texte.
D’où la volonté pour le camp présidentiel de voir aboutir cette loi, privée d’examen devant l’Assemblée nationale après l’adoption d’une motion de rejet qui a rassemblé les votes de la Nupes, des Républicains et du Rassemblement national.
« Aujourd’hui, il y a une volonté d’accord de la part du gouvernement, de la part de la majorité présidentielle et de la part d’une partie de nos oppositions », a expliqué la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet.

Des gages donnés à la droite

Le gouvernement n’a pas attendu longtemps avant d’entamer les négociations avec la droite : l’Exécutif aurait donné son accord pour inscrire une mesure de déchéance de nationalité pour les binationaux auteurs de crimes contre les forces de l’ordre. Un durcissement du droit du sol pourrait également faire partie de l’accord, en vertu duquel les enfants nés en France de parents étrangers devraient désormais faire connaître leur volonté d’acquérir la nationalité française à leur majorité. Et le président des LR Éric Ciotti a affirmé avoir obtenu des gages concernant « l’exonération de l’application du droit du sol pour les mineurs qui ont commis un crime ».
Si des compromis semblent trouvés, rien n’est cependant gagné : « J’ai reçu cette nuit des rédactions, qui prennent en compte un certain nombre de points, qui ne sont pas complètement satisfaisantes », a déclaré sur une radio le chef de file des LR au Sénat Bruno Retailleau, également membre de la CMP.
Reste ainsi la question de l’Aide médicale d’État (AME), transformée en Aide médicale d’urgence dans la version du texte rédigée par le Sénat. Le gouvernement, qui souhaite voir cet aspect reporté dans un projet de loi distinct, n’obtiendra pas facilement l’assentiment des Républicains : Bruno Retailleau a exigé de la Première ministre Élisabeth Borne qu’elle envoie « une lettre » au président du Sénat Gérard Larcher, détaillant la future réforme de l’AME.

Le risque de l’échec

En marge des négociations entre la droite et la majorité, le RN et la Nupes persistaient dans leur opposition au texte. Par la voix de son président Jordan Bardella, le Rassemblement national a ainsi fait savoir qu’il restait toujours fermement opposé à toute mesure de régularisation des sans-papiers.
Face à l’absence de compromis assuré avec la droite, le risque était de ne voir aucun texte sortir de la réunion de la CMP. Une situation qui pourrait aboutir dans ce cas à l’abandon du projet : si un recours au 49.3 reste en théorie possible, il a été écarté par Emmanuel Macron.
Et dans le cas où un texte de compromis parviendrait à sortir des travaux de la CMP, reste sa nécessaire adoption par le Parlement. Le président du groupe socialiste à l’Assemblée, Boris Vallaud, a d’ores et déjà appelé les « humanistes de la Macronie » à voter contre le projet de loi.

États-Unis : La gouverneure de l’Arizona envoie la garde nationale à la frontière avec le Mexique

Katie Hobbs, à la tête de l’État d’Arizona, accuse Washington de « refuser de faire son travail » et de ne pas assurer un accueil correct aux migrants qui affluent en nombre à la frontière mexicaine. Une nouvelle controverse contre l’administration Biden à propos de l’immigration, mais venant cette fois d’une gouverneure démocrate.
Lukeville, qui était un petit bourg transfrontalier d’Arizona plutôt paisible, est devenu en quelques mois le point de passage le plus prisé pour l’immigration illégale depuis le Mexique car Lukeville était l’une des cibles privilégiées des cartels. Leur stratégie est en effet de créer des engorgements d’immigrants aux passages jusqu’ici les moins empruntés pour que les garde-frontières soient dépassés et laissent rentrer plus facilement les migrants illégaux.
La réponse de Washington a été de fermer tout simplement le passage mais cela n’a pas plu à la gouverneure d’Arizona, car c’est toute l’économie de la ville qui en pâtit. « Une nouvelle fois, l’État fédéral refuse de faire son travail pour sécuriser notre frontière », a déclaré la gouverneure dans son ordonnance de vendredi.

Le président démocrate pris en tenaille

« L’Arizona a besoin de ressources et de bras pour rouvrir le point de passage de Lukeville, gérer l’afflux de migrants, et préserver une frontière sûre, ordonnée, et humaine », a-t-elle affirmé. « Malgré des demandes répétées d’aide, l’administration Biden a refusé de fournir les ressources désespérément nécessaires à la frontière de l’Arizona », a ajouté la gouverneure.
Et Katie Hobbs a donc annoncé envoyer la garde nationale pour organiser et faciliter les entrées, fustigeant l’administration Biden et son incapacité à gérer les problèmes sur le terrain.
La question de l’immigration illégale est l’un des enjeux des campagnes présidentielles aux États-Unis, ce n’est pas nouveau. Et cet ordre de Katie Hobbs, à la tête d’un État lorgné par les républicains, montre bien comment Joe Biden est pris entre le marteau et l’enclume, entre des républicains qui réclament des contrôles plus rigoureux et des démocrates qui demandent un système migratoire plus humain.

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