Le Conseil constitutionnel a invalidé le décret du président Macky Sall relatif au report des élections, qui ne peuvent de toute manière pas se tenir à la date du 25 février 2024 initialement prévue. Que faire ?
Après de vives manifestations entachées des morts, le Sénégal retrouve une légère quiétude. Mais le climat demeure délétère. Le Conseil constitutionnel a invalidé le report des élections présidentielles de 2024. À y regarder de près, le pays de la Téranga fait l’expérience des réalités de la démocratie « importée ». Macky Sall, face à une « césarienne improvisée » a voulu faire accoucher « un mort-né anticonstitutionnel » au Sénégal.
Selon le Conseil constitutionnel, la décision de reporter l’élection ne repose sur aucune base légale, « le président de la République ne disposant pas du pouvoir de reporter ou d’annuler le scrutin ». Le conseil des Sept Sages a également déclaré inconstitutionnelle la loi adoptée par l’Assemblée nationale le 5 février visant à reporter la date des élections au 15 decembre, permettant par la même occasion à Macky Sall de rester chef de l’État au-delà du délai constitutionnel.
Selon l’ex-ministre de la communication Moustapha Guirassy, un membre de la coalition de l’opposition du candidat Ousmane Sonko, « il faut préserver cette victoire en allant tranquillement vers les élections et que le peuple se libère, que le peuple choisisse le candidat qu’il veut à la tête de ce pays et nous saluons naturellement aussi le Conseil constitutionnel. Il a redoré le blason de notre démocratie, de notre nation, de toute la justice et peut être même de toutes les institutions ». Dans le même temps, le Sénégal fait l’expérience amère d’une démocratie « calquée ». Du coup, les tenants du pouvoir se font prendre dans le jeu du piège de la démocratie à l’occidentale. Or, il est difficile de se vêtir du manteau de l’agneau alors, qu’en réalité, l’on a les attributs du loup.
L’Afrique doit tracer son propre chemin
L’expérience du Sénégal montre que l’Afrique, berceau de l’humanité, a besoin de bâtir, en fonction de ses propres réalités, la marche qu’elle veut donner à son modèle démocratique. La démocratie est née chez les Grecs. Mais, l’humanité est née en Afrique. Le fait est là.
Bien que le Conseil constitutionnel ait annulé le report de l’élection présidentielle, il ne fixe pas de date pour la prochaine élection. Le débat se relance ainsi sur les turpitudes politiques et les intrigues à la veille des joutes électorales. Il faut faire avec dans la mesure où, l’universalité de la démocratie à l’occidentale a pignon sur rue dans une Afrique qui veut s’autodéterminer.
L’Afrique a besoin d’adapter ses aspirations profondes à celles de son histoire. Celle-ci se conjugue avec une démocratie qui, dans les anciens royaumes avait une particularité : celle de faire l’unanimité même dans le désaccord.
Le désaccord politique n’était pas synonyme de casses et d’actes de vandalisme. Il était source de dialogue et de compromis pour construire des entités fortes. L’Afrique regarde le Sénégal.