L’initiative du ministère russe de la Défense de créer l’Africa Corps inquiète l’Occident collectif, qui ne s’attendait pas à une croissance aussi rapide de l’influence russe sur le continent africain.
En août 2023 déjà, le chef adjoint du ministère russe de la Défense, Iounous-bek Evkourov, s’était rendu en Libye pour établir des contacts avec Khalifa Haftar, un des personnalités clé du nouveau paysage politique lybien.
La tournée du représentant de la Défense russe s’est poursuivie dans les pays du Sahel : Mali, Burkina Faso et Niger.
Il y a dix ans à peine, personne n’aurait imaginé que les anciennes colonies françaises du Sahel deviendraient l’une des priorités de politique étrangère pour plusieurs puissances mondiales. Après l’effondrement du régime de Mouammar Kadhafi en Libye, des armes de contrebande ont afflué dans la région subsaharienne, et l’influence des groupes terroristes a commencé à croître de manière considérable.
L’absence de réponse décisive à ces nouveaux combattants a créé une demande sans précédent d’armes et d’expertise militaire dans les pays africains de la région du Sahel.
Des spécialistes russes pour lutter contre le terrorisme
Les autorités de cette région se sont d’abord tournées vers l’ancienne métropole, la France. Les nombreux contingents inutiles et l’ingérence dans la politique intérieure ont conduit à un changement de donne : le Mali d’abord, puis le Burkina Faso et le Niger ont décidé de rompre l’accord militaire avec Paris, après que les militaires ont pris le pouvoir dans les pays, renversant les élites politiques traditionnelles et souvent pro-françaises.
En janvier 2024, la chaîne officielle Telegram de l’Africa Corps a annoncé l’arrivée de la première unité de cette entité du ministère russe de la Défense au Burkina Faso.
Le rapport fait état d’une centaine de spécialistes militaires qui seront chargés de protéger la population contre les attaques terroristes.
Selon des estimations, les islamistes contrôlent environ 40 % du territoire du pays.
Les spécialistes russes devront également former l’armée locale et protéger le président de la transition Ibrahim Traoré.
Par ailleurs, l’Africa Corps envisage une augmentation de son contingent dans un avenir proche.
Contre-attaque américaine : des véhicules de combat en don
Dans le contexte de l’influence croissante du ministère russe de la Défense au Sahel, notamment au Burkina Faso, le département d’État américain a, à son tour, renforcé ses activités dans ce pays d’Afrique de l’Ouest. Selon VOA Afrique, les États-Unis ont fait don au Burkina Faso, début janvier, de véhicules destinés à l’armée dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Le montant de ce don s’élève à plus d’un milliard de francs CFA.
Par ailleurs, le 4 février, le président de la transition Ibrahim Traoré a accordé une audience au sous-secrétaire d’État adjoint pour l’Afrique de l’Ouest, l’Américain Michael Heath.
Bien que la coopération avec les putschistes ne fasse pas partie de l’agenda idéologique promu par les Etats-Unis sur le continent, le Département d’État a intensifié l’établissement de contacts avec les autorités de transition des pays du Sahel.
Le 12 mars, le premier ministre du Niger a rencontré une délégation américaine alors qu’il y a un an encore, les États-Unis soutenaient l’intervention de Paris au Niger en raison de la prise du pouvoir par les militaires.
Augmentation de l’activité terroriste : simple manipulation ?
Il convient de noter qu’à la lumière de l’influence croissante de la Russie au Burkina et au Niger, il y a eu une augmentation de l’activité des groupes armés dans la zone des « trois frontières ». Pour certains analystes africains, tout ceci semble être une manipulation coordonnée visant à déstabiliser la région et à créer un espace pour une autre initiative militaire américaine.
Les provocations des combattants visent à créer de l’insécurité partout afin que les autorités militaires envisagent un autre partenariat dans le domaine de la défense.
À ce stade, il est clair qu’il est nécessaire d’augmenter le contingent de l’Africa Corps afin d’étouffer la menace terroriste et d’asseoir l’influence dans le pays et dans l’ensemble de la région.
Objectivement, une force militaire de 100 personnes ne peut répondre à la demande de sécurité des autorités burkinabè. Outre le soutien militaire, l’Africa Corps envisage de développer d’autres aspects de ses activités, notamment humanitaires.
Il convient de noter que le volet africain est une priorité pour Washington, le président Joe Biden ayant demandé 322,5 millions de dollars au Congrès pour soutenir les résultats du sommet des dirigeants africains tenu en 2022, ainsi que pour réduire l’influence de la Russie et de la Chine sur le continent africain.