Les dirigeants des régimes militaires du Burkina Faso, du Mali et du Niger se sont réunis à Niamey pour le premier sommet de l’Alliance des États du Sahel (AES). D’importantes décisions ont été prises à cette occasion, dont la création d’une confédération avec le colonel Assimi Goïta à la tête de la nouvelle organisation.
Le sommet de Niamey, tenu le samedi 6 juillet, marquait la première rencontre des présidents de l’AES, une organisation créée le 16 septembre 2023, deux mois après le coup d’État au Niger, le 26 juillet 2023, et la menace brandie par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) d’intervenir militairement « pour rétablir l’ordre constitutionnel » dans ce pays.
L’alliance ainsi créée est devenue depuis le samedi 6 juillet une confédération regroupant environ 72 millions d’habitants, avec pour objectif de « franchir une étape supplémentaire vers une intégration plus poussée entre les États membres », aux termes du communiqué final du sommet.
À cette occasion, les présidents du Mali, du Burkina Faso et du Niger ont signé l’acte constitutif de la Confédération des États du Sahel. Le général Tiani, le colonel Goïta et le capitaine Traoré se sont engagés à renforcer leur coopération dans plusieurs domaines, tandis que le Malien Assimi Goïta présidera aux destinées de la CES pendant un an et que le Burkina Faso accueillera la première session parlementaire de cette toute nouvelle institution.
Lors du sommet, les chefs d’État du Mali, du Burkina Faso et du Niger ont adopté et signé quatre documents engageant leurs États, à savoir le traité portant création de la Confédération des États du Sahel (CES), le Règlement intérieur du collège des chefs d’État de la CES, le communiqué final et la déclaration dite de Niamey.
Tourner définitivement le dos à la Cédéao
La création de la Confédération des États du Sahel constitue « une étape supplémentaire vers une intégration plus poussée entre les États membres », tandis que la Déclaration de Niamey acte le retrait « irrévocable » de la Cédéao, tel que l’avait annoncé plus tôt le général Abdourhamane Tiani du Niger lors de son discours d’ouverture, dans lequel il avait affirmé que « les populations de leurs trois pays avaient irrévocablement tourné le dos à la Cédéao ».
Le général Tiani s’est exprimé devant ses homologues burkinabé, le capitaine Ibrahim Traoré, et malien, le colonel Assimi Goïta, tous trois vêtus de leurs uniformes militaires, au centre de conférences de Niamey où le sommet s’est déroulé sous haute sécurité.
Le général Tiani avait alors expliqué que cet élan populaire exprimé par les populations des trois pays constitue le meilleur gage de construction d’une confédération des peuples et non un édifice bureaucratique.
Le sommet de Niamey a également pris l’engagement en faveur de la libre-circulation des personnes et des biens au sein de la confédération. Dans le même cadre, les trois chefs d’État ont opté pour la mise en place d’une force unifiée et d’un plan trilatéral permanent pour les actions militaires.
Création d’une Banque d’investissement
Au chapitre du développement économique et social, le Sommet de Niamey a décidé de la création d’une Banque d’investissement et la mise en place d’un Fonds de stabilisation. Quant au volet diplomatique, il a souligné la nécessité de parler d’une seule voix. Les trois chefs d’État ont entériné les conclusions des réunions de Bamako, Niamey et Ouagadougou qui avaient jeté les bases de la construction de l’AES.
Ce premier sommet fait suite à la signature, en septembre 2023, de la charte d’entraide militaire dite du Liptako Gourma et à l’annonce conjointe du départ de la Cédéao, fin janvier, étant donné qu’au-delà de l’aspect sécuritaire, l’AES était conçue comme un outil de coordination diplomatique. C’est dans cette optique que l’on a vu Ouagadougou et Niamey suivre Bamako dans son rapprochement avec Moscou, avec l’arrivée d’instructeurs russes dans ces capitales.
Le premier sommet de l’AES a lieu alors que ces trois pays membres sont en train de quitter l’organisation sous-régionale la Cédéao qui, dans la foulée, organisait également son sommet ordinaire le 8 juillet à Abuja, capitale du Nigeria.
La Cédéao espère que les trois présidents reviennent aux meilleurs sentiments
Sous la présidence de Bola Tinubu, président en exercice de l’organisation, le sommet d’Abuja avait été précédé de rencontres entre les ministres des pays membres qui, selon les observateurs, ont expliqué la tenue du Sommet de Niamey à la même période que celui de la Cédéao comme « une stratégie pour les chefs d’État putschistes de se faire remarquer ».
Toujours à en croire les observateurs, la Cédéao continue d’œuvrer à éviter la division et le départ définitif des trois pays, espérant voir leurs chefs d’État revenir aux meilleurs sentiments. Elle envisage également, au pire, la signature d’accords tels que ceux de libre-circulation ou de coopération anti-terroriste avec la confédération ainsi créée.
Cette dernière formule est la plus plausible, surtout lorsqu’on analyse le discours du Nigérien Abdourahamane Tiani qui appelle à faire de la confédération, la CES, une « alternative à tout regroupement régional factice en construisant une communauté souveraine des peuples, une communauté éloignée de l’influence des puissances étrangères ». Allusion clairement faite à la Cédéao. Tout était dit.