Le Nigeria avait planifié la fin de l’importation du pétrole raffiné pour la fin de l’année 2023. À la date du 29 juin 2024, cet objectif semblait loin d’être atteint. Pourquoi ? Explications.
La raison principale du retard accumulé est la rude concurrence que se livrent les compagnies étrangères d’exploitation des raffineries au Nigeria et la compagnie de raffinerie de Dangote Group. Cette situation crée un renchérissement du coût du brut. Or celui-ci est le produit de base pour raffiner le pétrole.
La concurrence déloyale a plombé l’objectif du Group Dangote de parvenir à fournir le pétrole raffiné à tout le pays.
Le 24 juin 2024, le vice-président du pétrole et du gaz chez Dangote Industries Limited (DIL), Devakumar Edwin, a sonné l’alarme. Il a accusé les compagnies pétrolières internationales (IOC) au Nigeria de comploter pour paralyser ses opérations. Selon Devakumar Edwin, les IOC contrecarreraient délibérément les efforts de la raffinerie pour acheter du brut local en augmentant le prix au-dessus de celui du marché, la forçant ainsi à importer du brut de pays aussi éloignés que les États-Unis, avec les coûts qui en découlent.
Edwin, qui l’a révélé à Lagos lors d’un programme de formation d’une journée destiné aux journalistes, a également accusé l’Autorité nigériane de régulation du pétrole du secteur intermédiaire et aval (NMDPRA) d’avoir accordé des licences aux commerçants pour importer des produits raffinés sales dans le pays.
« Le gouvernement fédéral a délivré 25 licences pour construire des raffineries et nous sommes le seul à avoir tenu nos promesses. En effet, nous méritons tout le soutien du gouvernement. Il est bon de constater que depuis le début de la production, plus de 3,5 milliards de litres, ce qui représente 90 pour cent de notre production, ont été exportés. Nous appelons le gouvernement fédéral et les régulateurs à nous apporter le soutien nécessaire pour créer des emplois et la prospérité de la nation», a-t-il déclaré.
Une concurrence déloyale qui plombe l’autosuffisance du Nigeria
Selon lui, tandis que la Commission nigériane de règlementation du pétrole en amont (NUPRC) fait de son mieux pour leur attribuer le brut, les IOC contrecarrent délibérément et volontairement leurs efforts pour acheter le brut local. Il a tenu à rappeler que « le NUPRC a récemment rencontré des producteurs de pétrole brut ainsi que des propriétaires de raffineries au Nigeria, dans le but de garantir le plein respect des obligations nationales d’approvisionnement en pétrole brut (DCSO), telles qu’énoncées à l’article 109.2 de la Loi sur le pétrole (PIA) ».
Devakumar Edwin n’y va pas avec le dos de la cuillère pour fustiger l’attitude des compagnies pétrolières internationales. « Il semble que l’objectif des COI soit de garantir que le Nigeria reste un pays exportateur de pétrole brut et importateur des produits pétroliers raffinés. Ils (les COI) sont désireux d’exporter les matières premières vers leurs pays d’origine, y créant ainsi des emplois et de la richesse, augmentant leur PIB et déversant les produits raffinés coûteux au Nigeria – nous rendant ainsi dépendants des produits importés. C’est la même stratégie que les multinationales ont adoptée pour tous les produits de base, plaçant le Nigeria et l’Afrique subsaharienne face au chômage et à la pauvreté, tout en créant de la richesse pour eux-mêmes à nos dépens. C’est de l’exploitation pure et simple. Malheureusement, le pays fait aussi leur jeu en continuant à délivrer des licences d’importation, au détriment de notre économie et de la santé des Nigérians, exposés à des produits cancérigènes », conclue-t-il.
Cette situation prouve que la lutte pour l’autosuffisance en pétrole raffiné ne serait pas de tout repos pour le Nigeria. Mais, le combat n’est pas perdu d’avance dans la mesure où tout peut se résoudre par la prise de décision politique courageuse afin de protéger l’économie nationale et les populations nigérianes.