Faire de la corruption un métier à très haut risque, c’est le pari fou que s’est lancée l’Agence congolaise de prévention et de lutte contre la corruption (APLC), un Service public relevant de la Présidence.
Créée il y a juste deux ans par une ordonnance du Président Félix Tshisekedi et restée jusque-là discrète sur ses activités, pour des raisons évidentes de ses missions, dans un pays où aucun segment de la vie nationale n’échappe au fléau de la corruption, l’APLC a tenu, par devoir de redevabilité, à présenter à l’opinion les différentes palettes de ses activités.
C’est dans ce cadre qu’Onésha Afrika a été l’invité d’un point de presse, le mercredi 6 juin à l’hôtel Memling de Kinshasa, tenu sous la modération de Mme Chouna Lomponda, Conseillère et chef de service de la Communication.
Sous la conduite de son Coordonnateur Thierry Mbulamoko, assisté de ses trois adjoints, le staff de l’Aplc a livré au public congolais une idée exacte de ses réalisations durant ses premières années d’existence, ainsi que leur impact sur l’amélioration de la gouvernance financière en RDC.
D’entrée de jeu, le Coordinateur Mbulamoko a tenu à éclaircir l’assistance sur ce que d’aucuns qualifiaient de déficit de communication dans le chef de l’institution à sa charge. Selon lui, cette discrétion tient d’abord de la spécificité des missions confiées à son organisme, qui le pousse à une certaine réserve, et aussi au fait que l’Aplc manipule des informations sensibles concernant directement des cibles qui pourraient les amener à effacer les traces de leurs éventuels forfaits avant d’en répondre, le cas échéant, devant la justice.
Une discrétion qui se justifie également par un souci de protection des témoins et autres lanceurs d’alertes, sans omettre le principe sacro-saint de la présomption d’innocence dans le chef des personnes soupçonnées d’éventuelles malversations.
Dans son travail, a expliqué M. Mbulamoko, l’Aplc s’assure du service permanent de 59 analystes pluridisciplinaires, de 7 officiers de police judiciaire et d’une équipe de 20 conseillers, chacun étant spécialiste dans son domaine. À ce jour, près de 100 dossiers de spoliation des biens de l’État ont été exhumés et se trouvent pour la plupart en fixation devant les juridictions.
300 millions de dollars récupérés dans l’ex-Katanga
Des équipes d’enquêteurs ont déjà été déployées dans certaines provinces où il y a eu des signalements de fraudes diverses, comme au Kongo central (ports de Matadi et de Boma) ainsi que dans trois provinces de l’ex-Katanga.
Ainsi, les détectives de l’Aplc ont eu à intercepter, ces derniers mois, 33 camions remplis de minerais (cuivre et cobalt), dont certains avec une signature radioactive dépassant les normes admises.
Rien que dans l’ex-Katanga, les opérations coup de poing de l’Aplc ont permis au Trésor public congolais de récupérer plus de 300 millions de dollars US, a précisé le Coordinateur Mbulamoko, qui a souligné que l’ambition de son organisme est d’étendre sa toile sur l’ensemble du territoire national.
À son tour, le Coordonnateur adjoint Francis Lusakueno a ajouté qu’en plus du secteur minier et financier, l’Aplc s’est intéressée au patrimoine public et privé immobilier de l’État. Aussi, grâce à sa vigilance, un parc immobilier de près de 8 000 maisons de l’État spoliées ont pu être placées sous enquête.
Le staff de l’Aplc a insisté sur le fait que cet organisme, essentiel dans l’amélioration de la gouvernance publique, n’a pas que le volet répressif dans ses prérogatives, mais aussi l’aspect prévention des pratiques de corruption.
C’est ainsi que l’Aplc a élaboré une stratégie nationale qui a été validée pour la période 2022-2026, qui relève toutes les manifestations de la corruption dans divers secteurs de la vie nationale.
Cette stratégie nationale propose différentes pistes de prévention de la corruption, comme une loi anti-corruption, l’amélioration du cadre institutionnel et même l’introduction de cours de sensibilisation contre cette anti-valeur dans le cursus scolaire et académique.
Pour le jeune staff de l’Aplc, la lutte contre la corruption, un des chevaux de bataille du Président Félix Tshisekedi, doit être un combat collectif et de tous les jours, tant le mal est profondément ancré dans le mental des populations, aussi bien auprès des élites que des masses populaires.