Sans migrants, les États-Unis seraient-ils toujours la première puissance économique mondiale ? « Non », répondent des experts, selon lesquels l’immigration constitue la « colonne vertébrale » de nombreux secteurs économiques essentiels.
En pleine année présidentielle, la question de l’immigration s’est imposée comme un sujet explosif en Amérique, le candidat républicain Donald Trump usant d’une rhétorique toujours plus violente à l’encontre des migrants et promettant de procéder à des expulsions massives s’il venait à retourner à la Maison Blanche.
Dans cet immense pays à la population vieillissante, les travailleurs immigrés constituent « la colonne vertébrale » de l’économie, explique Justin Gest, spécialiste des questions d’immigration à l’université George Mason près de Washington.
De nombreux secteurs comme ceux de l’alimentation, des services, de l’agriculture, de la santé ou encore de la construction « dépendent structurellement de la main d’œuvre immigrée », estime le politologue.
Cela, notamment parce que les travailleurs immigrés constituent l’une des mains d’œuvre les « plus flexibles, mobiles et polyvalentes du pays », explique-t-il.
Priver les entreprises de cette manne serait ainsi « cataclysmique pour certaines industries », prévient Heidi Shierholz, ancienne économiste en chef au ministère américain du Travail et présidente d’un centre de réflexion économique progressiste.
Une immigration abondante empêche l’inflation et bénéficie à l’économie américaine
« Et cela aurait des effets en cascade sur toute l’économie », poursuit l’ancienne économiste en chef. Pour Justin Gest, « le coût de la main d’œuvre augmenterait » et donc « entraînerait des pressions inflationnistes qui se traduiraient par une hausse des coûts pour tous les Américains ».
Au contraire, une augmentation de l’immigration bénéficierait à l’économie américaine, selon les prévisions de l’agence du budget, un organisme transpartisan du Congrès américain.
Les arrivées en hausse de migrants devraient ainsi permettre à l’économie du pays de gagner 7 000 milliards de dollars sur la prochaine décennie, en partie grâce à la force de travail de ces personnes, a estimé en février cet organisme.
« Les Etats-Unis bénéficient d’une main-d’œuvre abondante qui traverse la frontière » et qui confère au pays « un avantage comparatif: les salaires n’augmentent pas, car le manque de main d’œuvre n’exerce pas de forte pression sur la croissance des salaires », a déclaré en avril la directrice du FMI Kristalina Georgieva.
Les nouveaux arrivés viennent en effet pourvoir des emplois peu qualifiés qui peinent à être pourvus par d’autres travailleurs.
« Trop-plein d’emplois »
« Les Etats-Unis ont quelque chose que les autres pays des Amériques n’ont pas: un trop-plein d’emplois », explique Oscar Chacon, directeur d’Alianza Americas, une coalition de 58 associations de défense des immigrés dans le pays. Plus de 8 millions d’emplois sont non pourvus à travers le pays, selon le ministère du Travail.
Toutefois, ces arrivées de migrants « créent un problème de politique intérieure », signale la directrice du FMI.
La question divise les Américains. Les républicains accusent ainsi le président démocrate d’avoir laissé le pays se faire « envahir ». Depuis le début de son mandat, plus de 7 millions de personnes ont été interceptées après avoir franchi illégalement la frontière avec le Mexique, selon les chiffres officiels.
Et Donald Trump se réfère régulièrement à des meurtres particulièrement choquants, commis par des personnes entrées illégalement aux Etats-Unis, pour marteler qu’il existe une vague de criminalité due aux migrants clandestins, sans que les statistiques ni les études réalisées par des experts, ne confirment néanmoins un tel phénomène.