Accueil Actualité Kenya : La face cachée de la réalité

Kenya : La face cachée de la réalité

Le président William Ruto (Image source : nairobileo.co.ke)

Le Kenya fait face à des manifestations d’envergure contre des lois votées à l’Assemblée nationale. Officiellement, on déclare 13 morts. Comment en est-on arrivé à là ? Décryptage.

Le président William Ruto a posé les jalons après les manifestations. Il a refusé de signer la loi objet de controverse entre le pouvoir et les populations. Mieux, le président Ruto a fait retirer le projet de loi. « Après avoir écouté attentivement le peuple kényan, qui a dit haut et fort qu’il ne voulait rien avoir à faire avec ce projet de loi des finances 2024, je m’incline et je ne promulguerai pas le projet de loi des finances 2024, qui sera par conséquent retiré », a déclaré William Ruto dans son discours.
« Après l’adoption du projet de loi, le pays a été témoin d’une large expression de mécontentement à l’égard du projet tel qu’il a été adopté, qui a malheureusement entraîné des pertes en vies humaines et des destructions de biens», a ajouté le chef de l’État. « Puisque nous nous sommes débarrassés du projet de loi des finances 2024, il est nécessaire d’avoir une conversation en tant que nation à l’avenir. (…) Comment gérer ensemble notre situation d’endettement ? (…) Je proposerai un engagement avec les jeunes de notre nation, nos fils et nos filles », a-t-il affirmé.

Le soutien des États-Unis oublié ?

Ces troubles interviennent après que le président Ruto avait été reçu à la Maison Blanche en grande pompe en mai 2023. Ceci explique-t-il cela ? L’analyse ne saurait le dire. Cependant, le Kenya est un allié stratégique des États-Unis dans la lutte contre le terrorisme et la surveillance en Afrique subsaharienne. Lors de cette visite, le président américain a précisé que : « C’est l’aboutissement d’années de collaboration. Nos opérations conjointes de lutte contre le terrorisme ont permis de réduire l’État islamique et le mouvement terroriste islamiste al-Chabab dans toute l’Afrique de l’Est. Notre travail commun sur Haïti contribue à ouvrir la voie à la réduction de l’instabilité et de l’insécurité ».
Si Washington mise beaucoup sur le Kenya, c’est qu’il y voit un havre de stabilité démocratique, en plus d’une locomotive économique. Joe Biden avait promis également de visiter le pays les prochains mois, en vue d’établir un nouvel accord commercial stratégique d’ici la fin de l’année 2024. Le Kenya est un pays de taille moyenne qui ne connaît pas de coup d’État, de djihadisme, de nationalisme hystérique, qui a un peu d’argent et qui a un territoire raisonnable, note Gérard Prunier, historien spécialiste de la corne de l’Afrique, pour justifier le choix américain.
L’anthropologue spécialiste du Kenya Benoît Hazard ajoute que le pays bénéficie d’une stabilité géopolitique, tout en bénéficiant d’une position géographique stratégique. Il y a des liens très forts entre les États-Unis et le Kenya, précise l’anthropologue. Le soutien stratégique dans des secteurs-clés est important.

« Les États-Unis sont le troisième partenaire à l’export du Kenya et cela pourrait s’accentuer avec le vote d’un traité de libre-échange. Le président kényan a aussi appelé Washington à prolonger un accord qui ouvre le marché américain à plusieurs pays africains, l’»African Growth and Opportunity Act ». Ce dernier doit expirer en 2025.

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