Depuis belle lurette nous nous sommes donné le devoir de faire revivre régulièrement pour nos lecteurs ces gens de couleur qui ont marqué l’Histoire de leur société.
Tous ces souvenirs sont issus des extraits tirés de l’ouvrage ; Mémoires du Monde noir, écrit en 2005 par David Gakunzi, à qui nous présentons encore nos hommages pour la qualité de la recherche.

« Un peuple qui a la mémoire courte est un peuple qui n’a pas d’avenir »

Charlie Parker

Surnommé Bird, Charlie Parker a été le feu-follet du jazz. Né le 29 août 1920 à Kansas city, Charlie Parker meurt le 12 mars 1955. Enfance difficile, drogue ; il gagne sa vie à 15 ans en jouant du saxo baryton.
Saxophoniste, compositeur, il fut le créateur du style « bop ».
Certains l’appelaient demi-dieu, d’autres double-dieu ; Parker volait si haut. Il survolait les hommes avec assurance. Ses ballades étaient candidement enivrantes, ses envolées fières et libres, pleines de désir et des vérités. Toute sa vie il l’a vécue comme un enfant terrible, insaisissable et indomptable entre rêve nomade et fiction envahissante.
Toute sa vie il a brulé son cœur, ses poumons et sa foi à la flamme de son génie.
Certains l’appelaient demi-dieu, d’autres double-dieu : Parker volait si haut.
A l’instant où il s’éteignit il y eut un formidable coup de tonnerre dans le ciel de New-York. A peine fut-il mis sous la terre que partout surgirent des graffiti : Bird lives.
Certains l’appelaient demi-dieu, d’autres double-dieu.
Avant de s’en aller, il écrivit un poème à son ex-épouse : « Écoute les mots ! Pas la doctrine. Écoute les paroles ! Pas la signification…
La mort est imminente… Mon feu est inextinguible. » Parker volait si haut.

Zanzibar révolte
La révolte des exclus de l’île

Le 12 janvier 1964, une insurrection éclate à Zanzibar. Le sultan est alors déposé et remplacé par un gouvernement révolutionnaire animé par Babou.
A Zanzibar le peuple se lamente : « Qu’est-ce que nous avons fait au Bon Dieu pour endurer ce que nous endurons ? Nous travaillons, nous travaillons et l’argent ne vient pas. Qu’est-ce que nous avons fait au Bon Dieu ? »
A Zanzibar Babou dit au peuple : « Le Bon Dieu n’a rien à voir dans cette affaire. Allons voir plutôt du côté des sultans. C’est là que se trouve l’arbre porteur d’argent et c’est votre sueur qui l’arrose. »
A Zanzibar le peuple s’est soudain redressé, le visage en avant. Les maigres et sombres d’en bas ne porteront plus les gros et clairs d’en haut.
A Zanzibar les esclaves d’hier ont décidé de devenir les maîtres de leurs terres.

Chine
Une girafe en Chine

En 1445, des émissaires du roi du Mali arrivent en Chine avec un cadeau de leur empereur à son homologue chinois. Ce fait divers est la preuve que l’Afrique a toujours entretenu des relations avec l’Asie.
La nouvelle s’est répandue comme une traînée de poudre. De bouche à oreille. La place royale est noire de monde. L’objet de la curiosité : un étrange animal offert en cadeau à l’empereur de Chine par le roi du Mali. A la vue de cet animal au cou étiré et à la peau tatouée, les Chinois ne finissent pas de s’étonner. Et l’empereur est manifestement comblé par le cadeau. Sur le drapeau de l’Empire du Milieu figurera désormais cet étrange animal venu d’Afrique.
Au fait, quel est son nom ? C’est une girafe !

Parution du « Cahier d’un retour au pays natal »
Chant source de laves

Ce 17 février 1939, un long poème « Cahier d’un retour au pays natal » écrit par un jeune Martiniquais du nom d’Aimé Césaire vient de paraître dans le numéro de février de la revue Volontaires. Il va marquer toute la littérature négro-africaine.
Chant complexe, dense, abrupt étrange, convocation à la fête cosmique, chant silo où se préserve ce que la terre a de plus terre, la vérité de plus vérité ; chant plongé dans la vérité de l’être, truelle à la main, lance au poing ; chant source de laves, de feu de brousse, de flambées de chair comme l’orage, l’incendie, la mitraille ; chant qui dit orage, fleuve, tornade, feuille, arbre qui plonge dans la chair rouge du sol, dans la chair ardente du ciel, qui n’est ni une tour ni une cathédrale ; chant mouillé de toutes les pluies, humecté de toutes les rosées, chant évangélique annonçant une bonne nouvelle : la négritude retrouvée. Chante, chante Aimé Césaire bouche des malheurs qui n’ont point de bouche.

Congrès de la race noire
Réunir les indignations éclatées

Un certain nombre d’intellectuels noirs, dont Blaise Diagne, député Sénégal, et le Dr Dubois tiennent à Paris ce 2 février 1919 le « Congrès de la race noire ». Ce congrès mettra en lumière l’injustice dont souffre le monde noir.
Qu’y a-t-il de commun entre ces Antillais, ces Américains, ces Africains réunis dans le brouillard parisien ? A part la couleur de leur peau.
La même fatigue d’appartenir au silence ; la même fatigue de la puanteur coloniale ; A part la couleur de leur peau.
La même espérance d’égalité aux bras ; la même espérance de fraternité dans les cœurs ; A part la couleur de la peau.
La même fraicheur d’un langage orage ; la même fraîcheur d’une volonté de lever des échos. En un mouvement ils veulent tous regrouper les pleurs solitaires. En branche ils veulent tous faire grandir les indignations éclatées.

Jazz
« Jass »

Ce 18 mars 1913 est apparu dans la presse un mot étrange, un mot bizarre. Il est l’objet de controverses. Personne ne l’écrit de la même façon. Certains l’orthographient jass, d’autres jazz.
Les uns soutiennent que le jazz c’est la plus belle invention musicale du siècle. Les autres abhorrent cette musique « dégingandé » et « satanique ».
La société policée, disent-ils, se doit de mettre un point d’honneur à l’interdire car elle risque de pervertir la jeunesse.
Tout a commencé avec les bongos au Congo (RDC). Et ça a continué avec les saxos à Chicago où la musique noire s’est retrouvée dans le sang, la sueur et le labour. Les pieds se sont mis à bouger sur le tempo. Pour garder leur fierté, les Noirs chantaient. Ainsi il y eut Scott Josplin et ses ragtimes, Bessie Smith et le Blues de Saint Louis.
C’était une musique cool pour les oreilles, bonne pour le corps, bonne pour l’âme, bonne pour s’aimer. Et de ce groove qui voyagea par le train vint un nouveau style à Chicago. Satchmo soufflait dans la trompette. Dans les années quarante est arrivé le be-bop to be-bop or not to be telle était la question.

Andrianampoinimerina
La mer est la limite de ma rizière

En 1787, Andrianampoinimerina accède au trône. Grand conquérant, il parvient à réunir durant son règne l’île de Imerina. Cependant ce roi fut apprécié par son peuple surtout pour sa sagesse.
A sa naissance on le nomma Ramboasalama, c’est-à-dire « le chien bien portant » histoire de détourner et d’éloigner par un nom peu reluisant l’attention des mauvais esprits. Après son accession au trône, il fut appelé Andrianampoinimerina, c’est-à-dire le seigneur dans le cœur d’Imerina.
En 20 ans il s’imposa sur toute l’île malgache. Entre villages il instaura des concours de travail où les moins actifs payaient une prime aux plus efficaces. Pour que chacun puisse contenter la faim de son ventre il mit en valeur de nouvelles terres, construisit digues et canaux d’irrigation, introduisit la culture du « riz précoce ».
Il serait mort en disant : « la mer est la limite de ma rizière »

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