La place de l’Afrique dans les choix politiques de l’Union européenne, au lendemain des élections de juin, pourrait être l’enjeu principal du partenariat entre l’Europe et les pays africains. Avec 176 députés de l’extrême droite, soit un quart de l’hémicycle européen, ces élus ont un poids plus considérable que pendant la précédente législature.
Au sein des institutions européennes, il s’agira d’une première, car les partis extrémistes qui ne dirigeaient qu’une commission sur vingt vont s’activer pour en coiffer davantage.
Ils pourraient ainsi avoir désormais les coudées franches pour influencer les politiques de l’UE, tant il est connu qu’au Parlement européen, ce sont les commissions qui exercent le vrai pouvoir.
Pendant la campagne électorale, les populistes, les souverainistes et les nationalistes n’ont pas ménagé la politique conduite par la coalition entre les conservateurs, les libéraux et les socio-démocrates, surtout en matière d’immigration.
L’Afrique était quasi inexistante dans la campagne de 2024, mais à travers le thème de la migration, le continent d’où proviennent chaque année des milliers des migrants peut se sentir concerné par la droitisation qui est en train de s’installer dans les institutions de l’Union européenne. Il est dès lors intéressant de présager l’impact de cette nouvelle donne sur la coopération entre l’UE et les pays africains.
Le score engrangé par les droites, du centre-droit aux extrêmes, pourrait peser sur les politiques européennes concernant la Migration, le Pacte vert et le Budget. Ces trois domaines privilégiés de la coopération seront les plus touchés depuis la poussée de l’extrême droite.
Lutte contre l’immigration illégale
Concernant la migration, on s’attend à un durcissement sans précédent des lois sur l’entrée et le séjour des étrangers. La mise en œuvre des accords signés avec l’Union européenne portant sur la lutte contre l’immigration irrégulière par certains États comme la Tunisie pourrait mettre à mal la circulation des personnes au sein de l’UE. Sans oublier les expulsions inhumaines. Sous l’impulsion des députés d’extrême droite au Parlement européen, on peut craindre que de tels accords soient généralisés.
De l’autre côté, le Budget de l’UE a fait l’objet des critiques de la part des partis d’extrême droite et des populistes sur ses priorités. Tirant les leçons des élections devant un groupe de journalistes, le commissaire au Budget Johannes Han a estimé s’attendre à « une discussion difficile au cours de deux ou trois prochaines années ». Il ajoute : « Nous constatons aujourd’hui une sorte d’obsession des États membres à contenir le budget européen à environ 1% du PIB de l’Union. Que faut-il retenir ? En clair, l’Union aura tendance à réduire la somme qu’elle met à la coopération au développement ». Et l’Afrique est loin sur la liste de ses priorités.
Un bémol néanmoins : la droitisation de l’Europe coïncide avec les revendications de souveraineté des États africains, qui entendent s’émanciper de la tutelle européenne aux plans politique et économique. Mais l’Europe va demeurer pour longtemps le principal partenaire de l’Afrique, en dépit des changements que pourrait apporter l’extrême droite au parlement européen, notamment moins d’interventions politiques et exigence de compétitivité. À quoi le continent africain devra répondre par la gouvernance et la multiplicité des partenaires économiques.
France : le bloc de gauche remporte le scrutin devant le centre et RN
Le bloc de gauche a remporté 195 des 577 sièges au second tour des élections législatives anticipées en France, dont 182 pour le Nouveau Front populaire (NFP) et 13 divers gauche, selon les résultats définitifs du ministère de l’Intérieur publiés le 8 juillet 2024. Le bloc de gauche devance le camp centriste (174 sièges).
Dans le détail, La France Insoumise a décroché 71 strapontins à l’Assemblée nationale, devant le Parti socialiste et ses 64 sièges, Les Ecologistes-EELV (33), le Parti communiste français (9) et d’autres formations de gauche, qui se répartissent les trois derniers sièges.
Le parti Ensemble du président Emmanuel Macron et ses alliés remportent 168 sièges : 98 pour Renaissance, 34 pour le MoDem et 26 pour Horizons. Six sièges « divers centre » complètent ce bloc centriste.
Le Rassemblement national (RN) allié aux Républicains d’Éric Ciotti suivent avec 143 députés, dont 126 provenant du parti dirigé par Marine Le Pen et Jordan Bardella, les 17 autres étant issus de l’alliance entre le parti d’extrême droite et les Républicains.
Les LR restés en dehors de ce rapprochement obtiennent 45 sièges, auxquels s’ajoutent 15 divers droite.
Déception dans les rangs du RN
Pari réussi pour la gauche, qui a fait bloc pour barrer la route au Rassemblement national, alors que les projections donnaient Bardella, allié de Marine Le Pen, comme futur Premier ministre après le raz-de-marée et un record historique des voix réussi par le RN au premier tour. Grosse désillusion donc pour le Rassemblement national, qui dénonce une « alliance de la honte » donnant « le pouvoir à l’extrême gauche », alors que pour Marine Le Pen, la victoire « n’est que différée ».
« L’alliance du déshonneur » prive les Français « d’une politique de redressement », a réagi pour sa part Bardella, qui voit Matignon s’éloigner après les piètres résultats du 2ème tour des législatives et la réussite du front anti-RN.
Le Premier ministre Gabriel Attal a immédiatement remis sa démission au président Emmanuel Macron, qui l’a reconduit pour expédier les affaires courantes. Mais les négociations s’annoncent rudes.
Jean-Luc Mélenchon, leader du groupe France Insoumise-Nouvelle Union populaire écologique et sociale, arrivé en pole position, se voit déjà occuper le poste de Premier ministre. Mais c’est sans compter avec le président Macron qui ne l’entend pas de cette oreille. Les jours prochains seront déterminants pour démêler cette équation à plusieurs inconnus.