Le vendredi 2 juillet, toute la Nation zambienne a organisé en son honneur des funérailles nationales pleines d’émotions, en présence de nombreux dirigeants et représentants du continent venus honorer sa mémoire. Le cercueil du premier président zambien, « mort paisiblement » à l’hôpital militaire de Lusaka où il était soigné pour une pneumonie, était exposé au National Heroes Stadium, dans la capitale, drapé des couleurs nationales et posé sur un véhicule militaire.
Parmi les hautes personnalités présentes à la cérémonie, présidée par le chef d’État zambien Edgar Lungu, il y avait notamment les présidents sud-africain Cyril Ramaphosa et ghanéen Nana Akufo-Addo ainsi que le président de la Commission de l’Union africaine Moussa Faki Mahamat. À l’annonce de la mort de celui que la population zambienne appelait affectueusement « KK », Lusaka avait décrété 21 jours de deuil national, alors que l’Afrique du Sud avait observé 10 jours de deuil et le Zimbabwe 3.
Il faut retenir que si Kenneth Kaunda avait affranchi la Zambie, alors Rhodésie du Nord, de la colonisation britannique, en 1964, il avait également été l’un des plus farouches pourfendeurs de l’apartheid, alors en vigueur en Afrique du Sud. À ce titre, il avait offert à l’African National Congress (ANC) de Nelson Mandela une base arrière dans son pays pour organiser sa lutte armée contre le pouvoir blancde Pretoria.
Dans le même registre, il avait accueilli sur son sol des dizaines d' »enfants de Soweto » fuyant la répression sanglante de juin 1976, et dont certains ont gracieusement poursuivi leur cursus à Great East Road Campus, à l’Université de Lusaka. Pour l’Histoire, le « Massacre de Soweto », survenu en représaille aux manifestations monstres organisées par les élèves noirs de l’enseignement secondaire contre l’usage de l’afrikaans – la langue des Boers – comme langue d’enseignement, avait fait officiellement 24 morts parmi les enfants et des milliers de blessés par balles. « KK », qui se présentait comme « un humaniste chrétien », avait également constitué un appui de premier ordre pour les différents Freedom Fighters à travers l’Afrique australe.
Le départ d’une icône
Dans son hommage, le président Edgar Lungu a salué le départ d’une « icône africaine », ajoutant avoir appris de Kenneth Kaunda « l’importance du patriotisme et de l’unité nationale ». Le président ghanéen, lui, a estimé que cette disparition marque « la fin d’une époque », alors que le Sud-africain Cyril Ramaphosa a rappelé que Kenneth Kaunda était le « dernier leader survivant de la génération qui a ouvert la voie à la libération de l’Afrique colonisée ».
Un « géant parmi les hommes », a déclaré Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l’Unionafricaine pour qui, sans lui, l’organisation panafricaine « n’existerait pas ». Le ministre britannique pour l’Afrique, James Duddridge, a pour sa part exprimé la « tristesse » de la reine Elizabeth II, soulignant la perte d' »un grand homme ».
Rattrapé par la chute du Mur de Berlin
Né le 28 avril 1924 dans la mission de Lubwa, dans le nord-est de la Zambie, de parents malawites, « KK », qui a été inhumé le lendemain de la cérémonie d’hommage, a exercé le pouvoir pendant 27 ans, sous un régime de parti unique. Proche de Moscou, il avait, tout comme son voisin Mobutu Sese Seko du Zaïre, nationalisé le secteur économique, notamment les fermes et les riches mines de cuivre et d’autres activités aux mains des étrangers, provoquant dans la suite une grave crise économique et sociale.
Comme partout en Afrique, avec la fièvre du multipartisme consécutif à la Perestroïka, en 1990, de violentes émeutes l’obligent à ouvrir l’espace politique et à organiser les premières élections démocratiques, en 1991. Il les perd face au syndicaliste Frederick Chiluba.
« C’est ça le multipartisme. Un jour on gagne des élections, un jour on en perd et ce n’est pas la fin du monde », avait-il déclaré à la télévision, en gentleman, au lendemain de sa défaite.
Onésha Afrika