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Ils ont fait l’Histoire

« Un peuple qui a la mémoire courte est un peuple qui n’a pas d’avenir »
(Citation de Maréchal Ferdinand Foch)
Par David Gakunzi (Extrait du livre : Mémoire du Monde noir)

Francisco Macias Nguema : Il n’aime pas la liberté

Le 1er octobre 1979, Macias Nguema est fusillé. Premier président de la Guinée équatoriale, autocrate mégalomane, il avait transformé son pays en une dictature sanglante. Chaque jour ce ne fut que complot déjoué dans le sang.
Il n’aime pas du tout la liberté de parole. Elle l’indispose, le chagrine. Et dans son chagrin il est capable de tout : d’écraser, d’étrangler.
Une parole libre et sa nuit est agitée. Une parole libre et il montre les incisives, aligne pelotons d’exécution et creuse fosses communes. Où donc, où donc a-t-il appris à tuer ?

Nat Turner : Mystique révolutionnaire

Né esclave en 1800, Nat Turner a conduit l’une des plus importantes révoltes d’esclaves des États-Unis. A la suite d’une série de visions il décide un jour que le temps de la révolte est venu et entreprend de soulever ses frères esclaves. Il sera finalement pris et pendu par les maîtres d’esclaves.
Chaque nuit il avait des rêves qui évoquaient toujours des scènes de fuite à travers champs et rivières, villes et forêts.
Une nuit, il eut une vision : des esprits noirs et des esprits blancs se livraient bataille dans le ciel, le tonnerre grondait et le sang coulait. Il entendit alors une voix lui dire : « Tu as été choisi pour être celui qui voit. Tu es venu sur terre pour lutter contre les forces du mal et favoriser le triomphe de la plus haute violence qui soit, celle de la justice. Que la tâche soit rude ou facile tu devras la supporter. Tel est ton destin. »
Quand un jour de février vint l’éclipse du soleil, il y vit un signe, un signal. Il se leva et souleva ses frères esclaves. A travers champs et rivières, villes et forêts, ils prirent la fuite.

Bunny Wailer : Voix Roots

Membre fondateur des Wailers, avec Bob Marley et Peter Tosh, Bunny Wailer reste encore la voix de la conscience de la musique jamaïcaine.
Il a grandi dans le ghetto dans une baraque d’une pièce tordue et mal foutue. La vie était trop dure pour survivre il fallait être bad boy piller et tirer. Même s’il ne perdit jamais une bagarre, il ne tomba pas dans le piège de Babylone. Un pas en avant, deux pas en avant il choisit la route de la justice.
Voix roots et lyriques consciencieuses le même message à ses frères.
Non ne reste pas assis à ta fenêtre, à regarder dans la rue, à te désoler parce que tu n’as rien à manger.
Il y a une lumière en toi alors laisse-la briller. Dresse-toi et remue-toi et décide-toi à essayer.
Essayer, essayer.

Doudou N’diaye Rose : Le tambour-Major

Né au Sénégal le 30 juillet 1930, Doudou N’diaye Rose est l’un des plus grands percussionnistes du monde. Pour nombre de musiciens africains il est « le maître ».
Enfant il s’est fait casser la clavicule gauche et battre des dizaines de fois par son oncle, désireux de le dégoûter du tambour.
Peine perdue : Doudou a fini tambour-major comme Joséphine Baker, de passage à Dakar en 1959, le lui avait prédit. Airs traditionnels, bruits de match de football, vacarme d’une nuit de tempête, Doudou sait dire tout ça en tambours. Ses épouses lui ont donné 37 enfants. Parmi ses fils, filles, brus, gendres et petits-fils, il a sélectionné trente percussionnistes qui l’accompagnent, lui, le patriarche.

Jesse Jackson : Arc-en-Ciel

Le 8 octobre 1941, naît Jesse Jackson. Il sera l’héritier de Martin Luther King dont il fut très proche. Pasteur baptiste et fondateur du mouvement Rainbow, il se consacre aujourd’hui à la défense des démunis de la société américaine : Noirs, Indiens, Chicanos, femmes, jeunes…
Le Président et les Oncles Tom ce qu’ils disent c’est du vent. Ils ferment les fabriques et les emplois s’en vont. Et si on parlait de Jesse. Le Président et les Oncles Tom veulent une nation plus forte à n’importe quel prix, et l’imbécile projet de conquérir le ciel qui se désintègre dans l’espace.
Et si on parlait de Jesse. Il est parti d’en bas, il est tout en haut. On ne l’a jamais vu fermer une école pour prêter de l’argent à Pinochet. On ne l’a jamais vu fixer le prix des bombardiers ou du cacao.
Et si on parlait de Jesse…

L’assassinat de Guevara : Citoyen du monde

D’origine argentine, Ernesto Che Guevara fut l’un des dirigeants de la révolution cubaine ; en 1965, il quitte le Cuba pour aller soutenir la guérilla lumumbiste au Congo ; revenu en Amérique pour organiser la guérilla en Bolivie, il est assassiné le 9 octobre 1967.
D’un souffle de fumée ironique de son cigare aspiré, il efface toutes les consignes de la poésie engagée. Ce sont des hommes engagés qu’il veut, des guerriers silencieux. On raconte que lorsqu’il descendit de la Sierra pour chercher vivres et munitions, un chef d’usine lui offrit son confortable lit. « Je ne peux dormir sur un matelas quand mes soldats claquent des dents là-haut. » Il divisait aussi les hommes : ceux qui peuvent dormir sur un lit alors que d’autres souffrent et ceux qui ne peuvent pas le faire. Il ne savait que cela. L’Amérique possédante rit de toutes ses dents. De joie.
Che Guevara a été abattu dans la montagne bolivienne. Il était Argentin et Cubain à la fois. Africain aussi. Citoyen du monde tout simplement. Il n’est pas une révolte, une lutte pour la liberté pour laquelle il n’aurait donné son corps et son sang.
Il ne pouvait tolérer qu’un homme vole à un autre sa vie.

Louis Rwagasore : Un prince bon

Ce 13 octobre 1961, un drame se prépare au bord du lac Tanganyika : le prince Louis Rwagasore, la seule personnalité politique capable de faire l’unité du Burundi, est assassiné par un tireur d’élite grec.
En ce temps-là, au cœur de l’Afrique bouffée par la haine ethnique, il était un prince bon. Il disait des mots réconfortants qui réparent les murs lézardés et affermissent les espoirs hésitants.
Il disait : « Peuple, cette terre est petite si nous nous tournons le dos. Elle sera grande si nous nous serrons les coudes. »
Nation il incarna et peuple il ressuscita.

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