Au cœur de l’élection présidentielle de février 2024 aux Comores, il y a surtout de forts enjeux économiques. De part et d’autre, les attentes sont nombreuses, d’autant que le pays est promis à l’émergence d’ici 2030.
Deuxième producteur mondial de vanille et réservoir d’essences (ylang ylang et clou de girofle en l’occurrence), l’archipel aux parfums est en quête d’un développement économique. Le sujet est donc au cœur des priorités non seulement de la population, mais aussi des candidats, pour drainer le maximum d’intérêts d’environ 340 000 électeurs parmi les 870 000 habitants des trois îles.
Le président sortant, lui, brandit son Plan Comores Emergent. Azali Assoumani évoque comme réalisations : la construction du CHU El Maarouf à Moroni, qui vise non seulement à résoudre les questions de santé publique, en réorientant les 15 milliards de francs comoriens dépensés annuellement pour des soins à l’étranger, mais aussi développer le tourisme médical.
Il met également en avant les projets développés dans l’énergie thermique et photovoltaïque, la réhabilitation de routes ou les réformes entreprises en matière du commerce ou du travail.
Pour Mohamed Issimaila, porte-parole d’Azali, « aujourd’hui notre pays est connu. Cette notoriété permet aujourd’hui de susciter l’intérêt des investisseurs afin de réaliser les projets économiques portés par le président », explique-t-il.
Transformer le pays en un pôle touristique
Sur les cinq prochaines années, le président sortant promet notamment : le doublement de la production agricole ; la construction de zones économiques et spéciales ; l’amélioration de l’accès à l’énergie ; la promotion des jeunes entreprises dans l’attribution des marchés publiques ; la transformation de l’archipel en pôle touristique de l’Océan indien avec la réalisation de quatre hôtels de référence ; la construction d’infrastructures maritimes (pour mieux relier les îles) et aéroportuaires, avec la rénovation de l’aéroport de Moroni dont un accord a été signé avec les Emiratis.
L’opposition – qui a dénoncé « des irrégularités » pendant la campagne (absence de congés du président) et pendant le premier tour de l’élection (ouverture « tardive » de certains bureaux de vote, des retards dans l’acheminement du matériel électoral) – promet : la revalorisation des salaires ; la révision du système fiscal en faveur des entreprises locales ; l’accompagnement des acteurs de la vanille ; ….
« Il nous faut unifier notre pays qui est dépolarisé, lutter contre la vie chère », déclarée à LTA Mohamed Daoudou, président du parti Orange et leader de l’opposition qui, jusqu’à août 2021, était le ministre de l’Intérieur du président sortant.
La diaspora aux abonnés absents ?
Un autre sujet qui aura retenu l’attention lors de cette présidentielle est celui de la diaspora, qui revendique son droit de vote. En France, où ils constituent l’essentiel de la diaspora, ils sont environ 300 000 Comoriens dont les transferts de fonds ont représenté plus de 20% du PIB en 2022, selon la Banque mondiale. « C’est vrai qu’elle participe à la vie économique du pays, mais le vote de la diaspora va être un grand chantier à venir, parce que c’est d’abord une question technique, avec un dispositif fiable », estime un dirigeant du camp présidentiel. Ce que l’opposition qualifie «d’argument échappatoire». Avec une croissance économique qui oscille autour de 2,5% depuis plusieurs années et des perspectives économiques « favorables mais fragiles », selon la Banque africaine de développement (BAD), les Comores se rêvent en archipel émergent d’ici quelques années.