La République démocratique du Congo n’envisage pas de se retirer de l’East African Community (EAC). Le chef de l’État congolais Félix Antoine Tshisekedi l’a encore affirmé le vendredi 12 mai, devant la diaspora congolaise à Gaborone au Botswana, où il se trouvait en visite officielle.
« C’est une décision mûrement réfléchie », a précisé le président congolais. N’empêche que les épousailles entre Kinshasa et l’organisation sous-régionale semble avoir tourné au vinaigre, plus d’une année après des noces en fanfare.
Tous les indicateurs étaient pourtant au vert, et présageaient un mariage fécond, au lendemain de l’adhésion en grande pompe de la RDC dans la Communauté des États de l’Afrique de l’est.
Kinshasa, en proie à une agression du mouvement rebelle du M23, ouvertement soutenu par le Rwanda, trouvait dans cette alliance avec une organisation dans laquelle siégeait déjà son ennemi direct une voie royale de sortie de crise, alors que pour les autres sociétaires de l’EAC, l’arrivée du géant congolais, avec ses presque 100 millions de consommateurs, représentait une grande opportunité de commerce transfrontalier.
Sauf que pour y arriver, il fallait au préalable résoudre l’épineux problème de la rébellion du M23, et de son parrain le Rwanda.
Pour ce faire, la solution était toute trouvée : le déploiement des troupes de l’EAC, officiellement chargées de traquer et de désarmer les terroristes, selon la terminologie de Kinshasa.
Et ce fut le début d’une succession de quiproquos, qui semblaient perdurer.
Bien vite les autorités de Kinshasa ont cessé d’émettre sur la même longueur d’onde que leurs homologues de Nairobi et de Kampala, pourtant principaux pourvoyeurs des troupes au sein de la force de l’EAC en déploiement à l’est du sol congolais.
Traque pour Kinshasa, interposition pour les autres
Là où Kinshasa parlait de traque et de neutralisation des groupes rebelles, Kampala, Nairobi et leurs autres compères répondaient par interposition, et dialogue.
Une situation qui a fini par tourner presqu’au vaudeville, au point de pousser le gouvernement congolais à émettre des doutes quant à la sincérité de ses partenaires et du commandement de cette force sur le territoire congolais.
Au mois d’avril dernier, une réunion des états-majors des pays concernés, chargée de faire le point sur la question et convoquée à la demande de Kinshasa à Goma, fût ajournée sans raison apparente, alors que quelque temps auparavant, le général kenyan Niangah, commandant en chef des forces coalisées de l’EAC, démissionnait de son poste, et aussitôt remplacé par Nairobi, le tout sans concertation avec Kinshasa.
Dans la foulée, le gouvernement congolais annonçait sa résistance à renouveler le mandat de la force de l’EAC. Un refus confirmé par le chef de l’État congolais lui-même au sommet de la SADC à Gaborone, où il a annoncé un probable retrait des troupes de l’EAC, sans possibilité de rallonge, au plus tard fin juin, qui coïncide avec la fin de sa mission aux termes de l’accord, si les choses restent en l’état.
En attendant, Kinshasa a de nouveau le regard tourné vers sa vieille femme de la Communauté de développement de l’Afrique australe, qui vient de décider lors de son dernier sommet de mi-mai à Gaborone, du déploiement d’une force régionale dans la partie est de la RDC.
Reste encore à définir la dimension de cette nouvelle force, et des missions qui lui seront assignées, sans compter les modalités de cohabitation avec les contingents de l’EAC. Mais c’est là une autre histoire…
La RDC écarte l’option de se retirer de l’EAC
Au cours de l’entretien qu’il a eu à Gaborone avec la communauté congolaise du Botswana, le président Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo a écarté l’option du retrait de son pays de la Communauté de l’Afrique de l’Est.
En expliquant les raisons de son désaveu de la force de la EAC, il a affirmé que l’adhésion de la RDC à cette communauté était la réponse à une demande pressante des Congolais vivant dans la partie est de son pays, où s’exercent d’intenses activités commerciales.
Pour le président Tshisekedi, la RDC a adhéré à l’EAC de bonne foi, afin de faciliter le commerce transfrontalier et faire bénéficier à ses habitants les avantages de la libre circulation des biens et des personnes au sein de l’espace.
« L’agression par le Rwanda et une situation conjoncturelle »
Le président congolais assure ne pas regretter cette décision du fait de la position géostratégique de la RDC, situé entre deux océans. « L’actuelle agression de notre pays par le Rwanda est une situation conjoncturelle créée par les dignitaires du régime actuellement au pouvoir », a affirmé le chef de l’État congolais qui dit garder l’espoir de « voir un jour le Rwanda dirigé par un président non belliqueux qui entretiendra de relations pacifiques de bon voisinage avec la RDC ».
Devant ses compatriotes, le président congolais a réitéré ses observations sur la force régionale de l’EAC et reste optimiste sur l’engagement de l’armée congolaise, les Fardc, et l’appui de la force militaire de la SADC pour mettre fin à l’agression rwandaise.
L’échange entre le président Tshisekedi et sa diaspora de Gaborone s’est déroulée dans une effervescence particulière, après l’inauguration de la nouvelle ambassade de la RDC à Gaborone, en présence de l’ambassadrice Émilie Mushobekwa.