« Je n’ai pas 15 personnes déterminées, résolues pour m’aider », dixit, en 2009, Joseph Kabila Kabange, président de la République démocratique du Congo. Aveu d’échec, désaveu des collaborateurs ? Pour sa part, Félix Tshisekedi a-t-il pu faire un meilleur casting ?

La réponse, à notre avis, est donnée par le réaménagement technique du gouvernement, opéré en mars, dans la volonté de relever les deux grands défis de l’heure, à savoir la pacification de l’Est et la maîtrise de la forte inflation, qui anéantit le pouvoir d’achat des populations, sans oublier les visées électoralistes, à quelques mois des échéances de décembre 2023.

Jean-Pierre Bemba Gombo, l’expérience

Le président de la RDC, Félix Tshisekedi Tshilombo, reçoit Jean-Pierre Bemba (Image : congo-press.com)

Parmi les nouveaux venus, Jean-Pierre Bemba. Fils de Bemba Saolona, l’un des hommes d’affaires les plus prospères et inamovible président du patronat sous l’ère Mobutu, le nouveau vice-Premier ministre en charge de la Défense nationale dispose de sérieux atouts : de brillantes études en Belgique, dans le prestigieux Institut catholique des Hautes Études commerciales, ICHEC ; une longue expérience dans le monde des affaires ; des années de chef de guerre dans sa rébellion contre le régime de Laurent Désiré Kabila. Les dix années de prison passées injustement (il a finalement été acquitté), à la Cour pénale internationale, CPI, lui ont apporté, à entendre son discours, maturité, sagesse et un sens patriotique plus aigu.

Mais aussi, ses trois années comme l’un des quatre vice-présidents, dans la configuration post Dialogue inter-congolais de Sun City, en 2001-2003, lui assurent une bonne maîtrise des méandres politico-administratifs.
Les premières mesures prises dès son entrée en fonction sont de bon augure. Parmi elles, l’exigence faite à tous les généraux de présenter leur cursus. L’objectif visé est clair.

Antipas Mbusa Nyamwuisi, le nouveau ministre d’État en charge de l’Intégration régionale et grand notable du Nord-Kivu, possède une connaissance et une expérience peu communes des réalités et des violences vécues par les populations de l’Est de la république. Il avait occupé des fonctions similaires dans les années Kabila.

Vital Kamhere, le dernier défi personnel

Vital Kamerhe Lwa Kanyiginyi Nkingi

Vital Kamhere est une intelligence supérieure. Il l’a démontré, notamment, au perchoir de l’Assemblée nationale. Son parcours a été entaché par l’affaire dite des 100 jours où, condamné dans un premier temps à vingt ans de prison, il a été acquitté en appel, faute de preuves. La nomination de ce leader charismatique du Sud-Kivu, en qualité de vice-Premier ministre en charge de l’Economie pourrait lui permettre de redorer son blason terni.
Un bilan exhaustif sera présenté, secteur par secteur, vers mi-septembre, afin d’établir l’état du premier mandat de Félix Tshisekedi sur base, notamment, de l’action de ses ministres.

Sama Lukonde, le Premier ministre, est le premier à bénéficier du prestige lié aux performances de son équipe. Quant à Christophe Lutundula, vice-Premier ministre et ministre des Affaires Etrangères, il peut présenter un bilan diplomatique positif : la condamnation unanime de l’agression à l’Est de la RDC et la désignation de son vrai mentor, Paul Kagame du Rwanda ; la levée, par le Conseil de sécurité des Nations-Unies, de la mesure de notification sur les achats d’armes.

Paria devenue pays-solution, selon le vocable de Félix Tshisekedi, la RDC est désormais incontournable dans des dossiers importants comme le changement climatique et la transition énergétique. Ève Bazaïba Masudi, la vice-Première ministre en charge de l’Environnement, est appréciée notamment pour sa participation à la création de la « troïka forestière » Brésil, Indonésie, RDC, tous trois « pays-solution » au dérèglement climatique, dans la perspective d’un front commun lors des assises de la Cop27 ; pour son rejet de la co-facilitation du Rwanda sur le mécanisme de financement de la biodiversité.

Didier Budimbu, son collègue des Hydrocarbures, n’est pas en reste. La récupération des actifs miniers et des blocs pétroliers, évalués à 2 milliards de dollars, dans un accord avec l’homme d’affaires israélien Dan Gertler, est un signal positif.
Antoinette N’Samba Kalambayi et Julien Paluku, ministres respectifs des Mines et de l’Industrie,  respectueux de la règle édictée par le chef de ne plus permettre l’exportation des ressources naturelles sans un minimum de transformation, viennent d’offrir à la RDC ses premières usines de raffinage d’or et, surtout, de cobalt, dont ce pays possède les plus importantes réserves mondiales.

Tony Mwaba, le ministre de l’Enseignement primaire, secondaire et technique, met en place, lentement mais sûrement, l’effectivité de la gratuité de l’enseignement. Est-ce un hasard si, pour la première fois depuis des lustres, la rentrée scolaire 2022-2023 s’est faite sans grève ni autre mouvement de contestation ?

Performances financières uniques

Honorable Jean Pierre Lihau Le Parcours d’Augure ! Ministre de la Fonction publique

Pour sa part, Jean-Pierre Lihau, vice-Premier ministre de la Fonction publique, digne fils de Marcel Lihau Ebua, brillant constitutionaliste, professeur à Harvard et co-fondateur, avec Etienne Tshisekedi, du parti Udps, a entrepris des réformes qui permettront de faire de la Fonction publique un véritable instrument de développement.

Mention spéciale à Nicolas Kazadi, plébiscité par le journal panafricain Financial Afrik meilleur ministre des Finances, à son collègue du Budget, Aimé Boji, ainsi qu’à leurs collaborateurs des régies financières, Barnabé Mukadi Muamba (DGI), Parfait Ntabala (DGRA), et Blandine Kawanda (DGDA), qui ont permis au gouvernement de présenter des prévisions budgétaires de près de 16 milliards de dollars américains, alors que, jusque-là, les budgets oscillaient autour de 4 milliards.

Hommage également à Jules Alingeti, chef de l’Inspection générale des Finances, car jamais, de mémoire de Congolais, un mandataire de l’État n’avait fait preuve, comme lui, d’autant de détermination, d’imagination, d’intégrité et de moralité.
L’IGF existe depuis 1987, mais personne ne l’avait vue à l’œuvre. En moins de quatre ans, Jules Alingeti en a fait un partenaire incontournable de tous les gestionnaires des finances de l’État.

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