À l’approche de cet hiver qui se pointe déjà à l’horizon, toutes les capitales européennes ont les yeux rivés sur la vanne d’arrivée de gaz de chauffage, face aux caprices affichées par le fournisseur russe.

Si l’Europe entière marque son inquiétude à l’approche de l’hiver, la France, la Belgique, le Royaume Uni et l’Allemagne prévoient de nombreuses mesures en vue d’éviter les pénuries de gaz durant la saison hivernale, en vue de se prémunir de la menace de crise énergétique majeure qui se profile à travers le vieux continent.

En France, une municipalité a même décidé de mettre gracieusement des manteaux d’hiver à la disposition des écoliers, car il y aura un rationnement de chauffage dans les écoles, indiquent les médias locaux.

Gabriel Daube, le maire de Periers en Normandie, a prévenu que les bâtiments publics ne seront pas chauffés au-delà de 19°C, dans le cadre de mesures d’économie d’énergie prises par la municipalité. « C’est une disposition qui vient compléter toute une série de mesures visant à réduire la facture énergétique de la commune », a-t-il précisé.

Le maire a évalué le coût des manteaux à près de 6 000 € (5 860 $) pour un total de 350 élèves. Mais l’investissement sera rentable, a-t-il assuré, puisqu’il s’était fixé pour objectif d’économiser au total 10% des coûts énergétiques, correspondant à environ 20 000 €. Selon lui, les chauffages des bâtiments publics seront réglés à 19°, tandis que l’éclairage public sera complètement éteint à partir de 23 heures.

Au Royaume-Uni, les autorités de régulation de l’énergie ont également averti que le pays pourrait être confronté à un « risque important » de pénurie de gaz cet hiver. Ce qui signifierait que les grands consommateurs industriels britanniques devront cesser d’utiliser le gaz si une urgence nationale est déclarée en raison de la pénurie, principalement due aux effets de la guerre Russie-Ukraine et des mesures de rétorsion prises par le Kremlin face aux sanctions occidentales.

C’est le bureau des marchés du gaz et de l’électricité (Office of Gas and Electricity Markets
ou OFGEM) qui a transmis cet avertissement dans un communiqué au  principal quotidien londonien Times of London.

Flambée des prix et perturbations de tous genres

Crise énergétique : les Anglais brûlent leurs factures d’énergie pour dénoncer la hausse des prix (Image source : trendrasdars.com)

L’Agence internationale de l’énergie (AIE) avait alerté que les marchés mondiaux du gaz naturel resteraient tendus l’année prochaine, en raison de la baisse des flux de gaz de la Russie vers l’Europe, des prix élevés et de l’impact des mesures permettant d’économiser l’énergie.
La réduction drastique de l’approvisionnement en gaz naturel en provenance de la Russie entraîne de nouvelles flambées des prix internationaux et perturbe également les échanges commerciaux, entraînant des pénuries de carburant dans certaines économies émergentes et en développement, selon l’AIE.

En Belgique où la Wallonie a déjà opté pour la suppression de l’éclairage de ses autoroutes dès 22 heures, le gouvernement envisage d’imposer aux entreprises du secteur de l’énergie des taxes plus importantes que celles prévues par le plan d’urgence de l’Union européenne. Lobjectif est de permettre à l’État d’engranger plus de 4,7 milliards d’euros (4,6 milliards de dollars) de recettes supplémentaires pour faire face à la crise économique.

Le gouvernement fédéral a dévoilé une proposition visant à taxer les bénéfices excédentaires des entreprises productrices d’énergie. La ministre de l’Énergie fait savoir que son gouvernement estime pouvoir ainsi collecter 4,7 milliards d’euros sur deux ans pour soutenir les ménages et les entreprises vulnérables.

Alors que les ministres de l’énergie de l’UE sont parvenus à un accord politique autour d’un texte qui permet de fixer un plafond à 180 euros/mégawattheure pour les producteurs d’électricité, qui bénéficient de coûts de production nettement inférieurs au prix du marché en raison de la crise actuelle, comme les entreprises du secteur nucléaire ou des énergies renouvelables, la Belgique prévoit pour sa part d’imposer la taxe à partir de 130 euros/MWh.

Bruxelles prévoit aussi d’étendre la période d’imposition à deux ans, au lieu de sept mois prévus par l’UE, et d’instaurer un prélèvement rétroactif sur les bénéfices des entreprises de janvier 2022 à fin 2023. Il est aussi prévu de lever 1,2 milliard d’euros cette année et 2,3 milliards supplémentaires l’année prochaine, en plus des 600 millions que les entreprises de combustibles fossiles devraient verser chaque année au titre de la contribution de solidarité en cas de crise. Le plan doit néanmoins être encore adopté par le parlement.

L’Allemagne passe à côté de ses objectifs et fait les yeux doux à l’Algérie

L’Allemagne non plus pourrait ne pas atteindre ses objectifs d’économie de gaz, du fait de températures d’hiver prévues plus froides que la moyenne. Le gouvernement allemand était occupé à remplir les installations de stockage de gaz à 95 %, sans être assuré d’atteindre cet objectif d’ici le 1er novembre, délai qu’il s’était fixé. La brusque baisse de température ayant définitivement compromis ses plans.

La banque nationale allemande, Deutsche Bank, publie d’ailleurs un message repris par un site, enjoignant les ménages à réduire leur consommation de gaz d’au moins 20% afin d’éviter les pénuries pendant l’hiver. Mais les statistiques révèlent que les consommations des  ménages ont au contraire augmenté en septembre, par rapport à la même période de l’année dernière.

Si les ménages allemands réduisent leur consommation de gaz de 15 %, le pays évitera probablement les pénuries jusqu’à début mars, selon les experts, qui expliquent toutefois que si la consommation ne baisse que de 10 %, les installations de stockage de gaz seront vides en février.

Au moment où les pays européens appellent à une rationalisation de la consommation en énergie, les compagnies algérienne et allemande Tebboune et Steinmeier se sont,  quant à elles, accordées sur le renforcement de leurs «relations dans le domaine de l’énergie».

Berlin avait déjà anticipé toute éventualité d’assèchement de North Stream II acheminant le gaz en provenance de la Russie, dès les premières heures des paquets de sanctions économiques decidees par l’UE pour punir Moscou après son invasion de l’Ukraine, anticipant ainsi les mesures de rétorsion du Kremlin.

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