Le Roi du Maroc a tendu la main à l’Algérie. Dans cette énième tentative, le Souverain veut un rapprochement avec l’Algérie sur le brûlant dossier du statut du Sahara occidental.
L’Algérie n’avait pas encore réagi au vœu exprimé par le souverain Alaoui, au moment où nous publions ces propos. Lors du discours traditionnel marquant l’anniversaire de son accession au trône, le roi du Maroc, Mohammed VI, a tendu «une fois de plus» la main à l’Algérie, malgré la rupture des relations entre les deux voisins maghrébins.
«Nous aspirons à œuvrer avec la présidence algérienne pour que le Maroc et l’Algérie puissent travailler main dans la main à l’établissement de relations normales entre deux peuples frères», a affirmé le souverain dans un discours radiotélévisé à la nation, samedi 30 juillet.
« Je souligne une fois de plus que les frontières qui séparent le peuple marocain et le peuple algérien frères ne seront jamais des barrières empêchant leur interaction et leur entente », a-t-il souligné, en exhortant les Marocains à « préserver l’esprit de fraternité, de solidarité et de bon voisinage à l’égard de [leurs] frères algériens ».
L’an dernier, il avait déjà choisi de s’adresser à l’opinion algérienne, en pleine crise avec Alger. Mohammed VI s’est engagé « à trouver une issue à la situation actuelle et à favoriser le rapprochement et la compréhension entre les deux peuples ».
L’Algérie a rompu ses relations diplomatiques avec le Maroc en août 2021, accusant Rabat d’« actes hostiles ». Une décision « complètement injustifiée », selon Rabat.
Le Sahara occidental, la pomme de discorde
Le principal contentieux entre les deux poids lourds du Maghreb porte sur le territoire disputé du Sahara occidental, qui figure sur la liste des territoires non autonomes selon l’ONU depuis 1963, à la suite d’une demande du Maroc. À partir de l’entrée en vigueur du cessez-le-feu de 1991, le statut final du Sahara occidental reste à déterminer.
Depuis le départ des Espagnols, l’ONU considère que le Sahara occidental est un territoire sans administration. En effet, le Maroc a partagé le Sahara occidental avec la Mauritanie jusqu’au retrait de cette dernière en 1979 à la suite des accords de Madrid. La Mauritanie a occupé la partie sud du Sahara occidental en 1975, à la suite du retrait de l’Espagne.
Elle quitte cette région en août 1979, après une guerre d’usure de trois ans et demi face au Polisario, un mouvement luttant pour l’indépendance du Sahara occidental.
Après le partage, fin de 1975, le Polisario lança en février 1976 une guérilla contre les forces de ces deux pays. Dès 1977, la Mauritanie, minée par des difficultés économiques, a voulu mettre un terme à cette guerre coûteuse qui suscite un mécontentement au sein des forces armées.
Le 10 juillet 1978, le commandant de l’armée, le colonel Mustapha Ould Salek, met fin aux 18 ans de régime de celui qui l’a promu, le président Moktar Ould Daddah. Salek dirige alors une junte militaire qui prône une approche modérée, pro-française et pro-marocaine.
Souhaitant que la Mauritanie se retire de la guerre, le Polisario déclare unilatéralement un cessez-le-feu que la nouvelle junte accepte.
Salek porte ensuite son attention sur les relations de la Mauritanie avec le Maroc. Après quelques années de tergiversations, le Polisario exige en avril 1979 que la Mauritanie retire ses troupes de Tiris al Gharbiyya comme condition à la prolongation des pourparlers.
La situation est délicate car l’Algérie et le Sénégal lancent une campagne contre la Mauritanie à cause de ses liens privilégiés avec le Maroc. Le régime chancelant de Salek est finalement renversé le 6 avril 1979 par des militaires qui forment une junte de salut national. Comme la précédente, elle veut négocier la paix avec le Polisario sans s’aliéner le Maroc.
Exaspéré par la lenteur du processus, le Polisario met fin au cessez-le-feu en juillet. Craignant une guerre et ses conséquences économiques, la Mauritanie renonce, par traité, au Sahara occidental le 5 août, reconnaissant le Polisario comme seul représentant légitime.
Cette victoire du Polisario sera temporaire, car le Maroc s’empressera d’occuper le secteur abandonné par la Mauritanie. En 2002, un avis de droit de Hans Corell, vice-secrétaire général aux questions de droit, conclut que le Maroc n’est pas la puissance administrante du territoire.
Le document indique : « Le 14 novembre 1975, une Déclaration de principes sur le Sahara occidental a été signée à Madrid par l’Espagne, le Maroc et la Mauritanie (les accords de Madrid).
En vertu de cette déclaration, les pouvoirs et responsabilités de l’Espagne, en tant que puissance administrante du territoire, ont été transférés à une administration tripartite temporaire. Les accords de Madrid ne prévoyaient pas de transfert de souveraineté sur le territoire ni ne conféraient à aucun des signataires le statut de puissance administrante, statut que l’Espagne ne pouvait d’ailleurs unilatéralement transférer.
Le transfert des pouvoirs administratifs au Maroc et à la Mauritanie en 1975 n’a pas eu d’incidence sur le statut du Sahara occidental en tant que territoire non autonome. »
La cour internationale de justice en 1975 déclara, dans son avis consultatif, qu’il y avait bien des liens juridiques et d’allégeance entre le sultan du Maroc, l’ensemble mauritanien, et les tribus sahraouies, mais elle ne constituaient pas un lien de souveraineté territoriale et n’étaient pas de nature à empêcher la tenue d’un référendum d’autodétermination au profit de la population du territoire.
À partir de 2003, certains documents de l’ONU qualifient le Maroc d’« autorité administrante », ce qui lui donnerait le droit d’exploiter les ressources naturelles du territoire, par exemple d’autoriser des concessions pétrolières ou encore le phosphate. Le gouvernement de la RASD se revendique lui aussi puissance administrante du territoire.